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Paris by night (3) : le syndrome de la chambre

La chambre était d’une autre époque. Tout y était ancien, sobre et parfaitement rangé. Quand j’y entrais il était tard dans la nuit puisque le repas avait été animé et s’était éternisé. Ce mardi soir, exceptionnellement j’avais été convié par Martine Faure, députée soucieuse de m’associer aux moments importants de son mandat, au rendez-vous mensuel du mardi soir rassemblant les parlementaires girondins. Il se déroulait le plus souvent dans un restaurant parisien mais cette fois il était à la questure du Sénat.

Comme je regagnais la capitale le mercredi pour remplir mes fonctions de secrétaire général adjoint de l’Association des Maires de France (AMF) en charge du sport et de la vie associative, je pouvais parfois monter la veille au soir. Difficile alors de dénicher une chambre d’hôtel en milieu de semaine, à un prix abordable (voir la chronique de hier) et donc je réservais chaque fois dans un établissement différent et disponible.

Ce jour là, dès mon arrivée en soirée, je file découvrir ma trouvaille dans une rue derrière la gare Montparnasse. Pas facile de se repérer et de dénicher l’adresse mais avec de bonnes jambes je finis par arriver à bon port. Un autobus de grand standing occupe la rue et une nuée d’asiatiques jouent aux « fourmis » transportant des bagages. Ils semblent très excités. En me faufilant sans interrompre la file agitée par une sorte de frénésie de la recherche de la « fourmilière » j’arrive au comptoir. On y parle anglais et une gentille organisatrice distribue des clés dans une langue que je suis incapable d’identifier. Il me faut patienter !

« Bonjour madame. Avez vous une réservation au nom de M. Darmian ?

-Darmian, Darmian… Je cherche… » Du doigt mon interlocutrice passe et repasse sur la page de son almanach… « Darmian ? Darmian… Ah oui ! Darmian ! On ne vous a pas prévenu ?  » Je la sens gênée aux entournures.

-Prévenu de quoi ? J’ai réservé il y a une semaine… que se passe-t-il ?

Ah oui ! Mais c’est rayé sur la liste… On ne vous a pas prévenu ?

-Non

On a un autobus de Japonais et donc on a été obligé de réserver tout l’hôtel. On a dû vous appeler pour vous prévenir !

Vous plaisantez ! Rien ! Pas de mail ! Pas de message ! Rien! Je n’ai pas de chambre… et qu’est-ce que je fais maintenant ? ». Je hausse le ton en vain et elle les épaules. C’est irrémédiable

-On a tout prévu ! On va vous appeler un taxi et vous allez dans un autre hôtel de la chaîne près du périphérique.

Vous rigolez je n’ai pas le temps. Je suis attendu à 20 h… et à cette heure je vais mettre du temps pour traverser Paris ! C’est pas possible.

Oui mais on n’a pas d’autre solution…» me dit l’hôtesse avec aplomb et un sourire carnassier !

Il me faut prendre une décision car même si les fourmis ont disparu. Il est impossible de trouver une autre piste. « Appelez le taxi et je vais voir… ». Le temps tourne. Je fulmine. Le véhicule de secours arrive.

«  Combien faut-il pour aller à cette adresse ?

Le chauffeur est formel : « A cette heure ci plus d’une heure !

Alors vous m’emmenez directement au Sénat 15 ter rue de Vaugirard. Autrement j’y serai pas à 20 h. allez on y va ! Pour l’hôtel je verrai après ! »

Le repas à lieu dans l’appartement du questeur qui doit être logé sur place au cas où… un tantinet désuet, décoré à l’ancienne avec moulures dorées mais modernisé dans ses équipements. La douzaine d’invités est là. Le repas est arrivé. Un serveur attend ! Et bien évidemment je suis le dernier. On refera le petit monde girondin avec des moments où on se répand à déverser beaucoup de mal sur les absent.e.s ou à évoquer des plans d’enfer nationaux.

Tout le monde va manquer la séance de nuit ! Bien agréables ces dîners politiques. N’empêche que quand la troupe s’éparpille et que le maître des lieux me demande : « Où vas-tu ? » Je suis contraint de lui raconter ma mésaventure.

« T’en fais pas je crois qu’il y a des chambres ici ! Tu vas rester et demain tu repars quand tu veux en claquant la porte… viens on va voir. Moi je n’ai jamais utilisé cet appartement et je n’ai jamais dormi là. » Mon hôte me devance dans un couloir qui conduit à trois chambres… « Prends celle que tu veux ! La salle de bains ? Où est la salle de bains ? Là en face ! Bon je m’en vais. Bonne nuit ! ». Me voici installé sur la pointe des pieds dans l’appartement de l’un des questeurs du Sénat et dans des draps froids de la République qui sentent le moisi . Peu importe le lit pourvu que l’on ait les rêves.

Le lendemain matin je me lève paisiblement pour me rendre au siège de l’AMF. Tout est silencieux. Je me lève pour me rendre à la salle de bains au carrelage d’un autre âge. Je sors de la chambre en petite tenue… quand au bout du couloir je découvre une femme de ménage terrorisée à ma vue !

Je balbutie tétanisé : « Excusez moi madame… c’était pas prévu ! Monsieur le questeur m’a autorisé à passer la nuit ici !… excusez-moi ! Je m’en vais dans quelques minutes ! »

Bonjour Monsieur excusez-moi je ens ais pas qu’il y avait quelqu’un. Il n’y a jamais personne.» La dame, très gênée, plumeau à la main, bat en retraite sans que je sache si c’est par peur ou par politesse. Je m’esquive dans la salle de bains. J’entends la porte du couloir se refermer. Plus rien… le silence.

Je me dépêche ! Où est-elle passée ? Je remballe mes affaires et je ne mets que quelques minutes à quitter les lieux puis la questure puis le Sénat. Tout à coup en ce mois d’octobre 2011 je pense à une « affaire » qui a défrayé la chronique … j’ai vraiment la trouille !

Cette publication a un commentaire

  1. Puyo Martine

    Bonsoir,
    Après une journée de jardinage, c’est un plaisir de m’installer devant l’ordi et de lire vos aventures parisiennes. celle-ci m’a fait bien rire et je vous en remercie. l’affaire DSK ? quelle histoire. Heureusement vous y avez échappé. Cette femme de ménage du Sénat était certainement bien éduquée.
    Bonne soirée.
    j’attends la suite

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