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Le virus épidémique de l’abstention

Les élections municipales même si elles constituent vraiment le scrutin républicain de base, voient leur taux de participation national moyen diminuer constamment depuis plus de 40 ans. Ainsi on passe de pratiquement 79 % de votant.e.s en 1977 à seulement un peu plus de 63 % en 2014. La baisse est régulière ce qui dénote un véritable désintérêt citoyen croissant pour la démocratie de proximité. Ce phénomène a tout lieu d’inquiéter car la légitimité des élu.e.s peut être mise an cause dans une période où le fossé s’est creusé entre eux et les électrice.teur.s.

Une légère diminution (-3%) du nombre de candidat.e.s constituent par ailleurs une alerte supplémentaire sur l’engagement communal. Le nombre considérable de démissions en cours de mandat municipal parmi les édiles de 2014 a renforcé un constat pour le moins inquiétant.

Or il n’y pas eu cette année d’incitation au vote municipal sur les télévisions ou dans les grands supports médiatiques. L’affluence constatée aux réunions de la campagne traduit ce manque d’enthousiasme pour l’action publique la plus concrète et la plus diversifiée.

Que va-t-il se produire dimanche 15 mars avec en supplément la crise du coronavirus ? On peut véritablement être inquiet sur la venue dans les bureaux de vote quand un sondage indique que 42% des Français se disent inquiets avec différentes réactions face à cette crise sanitaire : stocks de provisions, désertifications des lieux publics, recul des activités de groupe (exemple : sports), crainte croissante. Le risque d’absentéisme aux prochaines élections municipales devient donc évident.

Avant pour le niveau 3 décrétant officiellement le niveau épidémique pas moins de 28% des Français envisagent de ne pas se rendre dans un bureau de vote pour voter aux municipales par crainte de transmission du coronavirus. Un facteur amplificateur de l’abstention qui pourrait encore s’aggraver compte tenu de l’accroissement de l’épidémie ces derniers jours !

Dans le détail, le taux d’abstention s’élèverait déjà, avant l’aggravation de la situation française, à 25% dans les petites communes, à 28% dans les autres villes de province et grimperait jusqu’à 36% dans l’agglomération parisienne.

L’analyse ne conduit pas à l’optimisme pour les listes qui souhaitent modifier la donne municipale. En effet 40% des 18-25 ans s’abstiendraient contre seulement 23% des plus de 65 ans qui resteraient donc les électeurs les plus assidus alors qu’ils sont davantage exposés aux risques de transmission.

Par ailleurs, les hommes seraient plus abstentionnistes que les femmes : 31% contre 25% ne souhaitent pas se rendre aux urnes du fait de l’épidémie. Il est quasiment certain que ce niveau d’absentéisme va s’accroître compte-tenu du climat anxiogène qui ne cesse de se renforcer !

Les élu.e.s sortant.e.s rivalisent d’imagination pour tenter de sauver les meubles. Le gel hydroalcoolique va couler à flots à l’entrée des isoloirs pour les un.e.s. Des gants jetables permettront à celles et ceux qui le veulent de prendre enveloppe et bulletin avec un bout des doigts (quoi que pour certains la contamination idéologique est grave!). Des milliers de stylos ont été achetés pour qu’ils aient un usage unique par votant. Des masques sont stockés pour les assesseurs qui se défilent de plus en plus nombreux pour ne pas passer leur journée à moins d’un mètre des votant.e.s. L’imagination est au pouvoir !

Ces élections municipales s’annoncent en définitive un peu particulières. D’abord parce que les résultats se construisent sur les réseaux sociaux dans un dialogue distant et plus dans les salles surchauffées avec des confrontations orales directes. Le débat ne fait plus recette. Il se fait par tweet ou par posts respectant ainsi la distance réglementaire pour éviter la contagion.

Retenons ensuite combien les télévisions auront contribué à démobiliser l’électorat. Les vrais enjeux globaux de ce scrutin (place de la commune, avenir de la fiscalité locale, transition écologique, sauvegarde de la vie associative, devenir des centres bourgs, logement…) ont été comme toujours éclipsés par des affrontements de personnes. Les isoloirs ne seront pas des lieux de quarantaine !

Le Covid-19 va enfin constituer l’excuse pour ne pas se déplacer pour les moins motivé.e.s et donc probablement handicaper les « nouveaux » venus n’ayant pas une clientèle attitrée et motivée ou une tête de liste connue. La mobilisation en faveur des idées nouvelles risque d’être faible. Le virus citoyen ne va se répandre sur le territoire national. C’est dès maintenant une certitude !

Cet article a 5 commentaires

  1. J.J.

    Il eut été sage que les pouvoirs publics remettent à plus tard ce scrutin, les électeurs, de surcroît parfois peu motivés ne veulent prendre de risques, ce qui est compréhensible, les assesseurs non plus. C’est certainement compliqué, mais il faut parfois prendre des décisions difficiles.
    J’avoue honnêtement, sans pourtant céder à la panique , mais en tentant au maximum de réduire les risques, que si j’avais été convoqué comme assesseur, j’aurais refusé.
    Sauf évolution favorable de la situation, ce qui est fort improbable, je n’irai pas voter.
    Ce sera la première fois de ma vie de Citoyen (l’élection du candidat favori est quasi assurée, mais j’aurais aimé m’exprimer quand même ).

  2. faconjf

    Bonjour,
    j’emprunte à Paul Sannat ce paragraphe : « Car nous sommes entrés dans l’anticipation de l’arrêt de l’économie française, qui est la prochaine sur le liste après le confinement général italien.
    Nous allons faire nos élections municipales, munis de gel et de savon, pour un virus aéroporté qui peut aussi rester en suspension dans les salles fermées… Bref, les élections françaises, comme celles en Iran, seront un accélérateur de contamination de même que le rassemblement religieux de Mulhouse l’a été au niveau national et presque international.
    Vous noterez au passage que ce rassemblement était largement inférieur à 5 000 personnes, puisque de mémoire nous étions à 2 000-2 500 fidèles.
    L’Europe est touchée au cœur, et l’économie européenne s’éteint au fur et à mesure où l’épidémie s’étend. »
    Triste constat, même si la contamination aérienne n’est qu’une hypothèse, qu’en partie vérifiée par le confinement du bateau de croisière Diamond Princess, ce navire de croisière resté coincé au large du Japon. Ainsi suite à la détection d’un premier cas suspect le premier février 2020. Les passagers du navire ont joué à leur corps défendant les cobayes en étant placés en quarantaine. Pendant la première quinzaine de février les symptômes de la maladie s’étendent avec une augmentation quotidienne des détections. Au final, quelque 500 personnes auraient été détectées positives par les autorités japonaises. Ce qui nous fait un taux de 15 %. OUI 15% un chiffre affolant car reporté à la planète cela donnerait un chiffre hallucinant proche du milliard de personnes infectées. Ma calculatrice donne en terme de décès, avec un taux de létalité de 3.5 comme suggéré par l’OMS 35 millions de morts (comparable à la grippe espagnole de 1918) alors qu’un taux de l’ordre de 0.1 correspondrait à un million de décès, comparable aux chiffres de la grippe. Pour les systèmes de soins, le chiffre important est le taux de gravité, ce qui explique que le directeur de la santé Salomon annonce le nombre de décès mais aussi celui des cas jugés « graves ». En Italie, quelques hôpitaux sont obligés de trier entre les patients qui ont un pronostic « jouable » et ceux qui en « très mauvais état » et pratiquement « condamnés », ne passeront pas dans la case réanimation.
    Au niveau des nations développées le problème consiste à gérer les cas graves. Le 9 mars sur le site Atlantico, le spécialiste des systèmes de soins Jean de Kervasdoue déclarait que « les cas de détresse respiratoire causés par le coronavirus nouveau conduisent inévitablement les patients en salle de réanimation ». Précisant par ailleurs « qu’en France, il y a 4500 lits disponibles dans les hôpitaux publics, auxquels s’ajoutent 500 lits dans le privé. À l’heure actuelle, 54 lits sont occupés dans le privé et 258 dans les hôpitaux publics. » Et pour finir une anticipation inquiétante sur l’évolution de la situation car « pour l’instant nous pouvons faire face à une augmentation du nombre de cas. En revanche, cela peut commencer si on dépasse 1000 personnes en services de réanimation. Cela sera le cas si on atteint 20 000 à 30 000 porteurs de virus. Et à mes yeux, c’est un scénario hautement probable auquel il faut se préparer dès aujourd’hui. »
    On voit donc à travers ces conjonctures que le pouvoir politique cherche à faire le grand écart entre le flux « soutenable » de cas graves nécessitant une hospitalisation ( capacité du système de santé à faire face) et l’économie qui se ralenti inexorablement. Le choix de maintenir les municipales résulte de ce choix. La bourse qui est une sorte de thermomètre contestable de l’économie accuse en ce moment une baisse de plus de 21% depuis le premier janvier.
    En fait tout cela n’est rien d’autre que des considérations mercantiles où notre santé est pesée à l’aune du cours des actions
    Salutations républicaines

    1. Bernadette

      Merci façon jf,
      Le gros soucis est que la pharmacie près de chez moi n’a pas de thermomètre, plus de liquide désinfectant et bien entendu pas de masques et ça depuis 1 semaine. Le reapprovisionnement est stoppé.
      Pourquoi les mairies disposeraient de tout alors que chaque famille est dans l’impossibilité d’acquérir les soins de base ? Ah le commerce ça déraille!

  3. J.J.

    Hier soir Anne Sophie Lapix annonçait sur la « 2 »que la Chine allait faire parvenir à l’Italie mille respirateurs et je ne sais combien de masques.
    Curieusement , je ne retrouve nulle part cette information dans ma « revue de presse « quotidienne.

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