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Le Dépanneur qui veut prendre le contrôle du Carrefour

Il y a deux ans, afin de connaître ce qu’était l’hiver canadien nous avions rejoint, avec mon épouse, la petite famille implantée à Montréal. Pour une découverte ce fut une découverte avec une vague de froid inhabituelle. Une épaisse couche de neige et du -25 ° le matin au moment d’emprunter la rue du lotissement de Longueuil pour aller chercher le journal et les muffins du petit-déjeuner. Le chemin verglacé sur 300 mètres jusque chez le dépanneur constituait un véritable parcours du combattant bien que le déneigement de la chaussée soit régulièrement effectué.

J’ai parfaitement compris la différence qu’il y avait entre la température sous abri et la température ressentie mais j’ai aussi découvert un mode de vie autour de la station d’essence avec ces espaces ouverts en permanence où l’on trouve l’essentiel pour faire des courses de secours ou de subsistance. Les « dépanneurs » appartiennent au mode de vie québécois et j’avais bien du plaisir à cette promenade « rafraîchissante » vers un lieu sympa, à taille humaine, nanti de produits standardisés mais extrêmement diversifiés. Certes les automobilistes remplissaient les réservoirs de leurs véhicules mais ils emportaient un café « géant » et tout ce que les régimes alimentaires européens considéreraient comme néfastes à la santé.

Or voici que le groupe canadien « Alimentation Couche-Tard » souhaite de suite s’unir avec le géant devenu très fragile appelé Carrefour et le racheter dans un second temps. Totalement inconnu en France, cette chaîne au nom typiquement québécois possède une solide notoriété en Amérique ou en Europe du Nord.

Les Canadiens exploitent en effet plus de 14.000 supérettes dans le monde, et emploie plus de 130.000 personnes dans ces « dépanneurs » aux larges horaires d’ouverture et proposant peu de produits de première « urgence » dans leurs rayons (alimentation, journaux, cigarettes, boissons, pâtisseries, légumes sous vide et tant d’autres offres).

Il y avait seul magasin « couche-tard » dans la banlieue de Montréal en 1980. En quarante ans la franchise s’est installée comme la référence des magasins de proximité. Un vrai paradoxe de voir les « rois » des petites surfaces utiles se proposer pour racheter une enseigne de grandes surfaces ayant dominé le commerce alimentaire durant des décennies.

Un signe de la modification des comportements de consommation qui se profile. Pas mal de centres commerciaux surdimensionnés souffrent actuellement. L’hypermarché cher à Carrefour et qui a fait sa fortune a du plomb dans l’aile.

Ces lieux comme on les connaît en périphérie des villes, pour lesquels il faut faire une demi-heure minimum de voiture (les bons jours) avant de stationner au milieu de vastes parkings nécessitant des déplacements à pied participant d’une forte perte de temps, sont en nette perte de fréquentation (de 30 à 30 %). Le coronavirus a été un accélérateur de tendances qui émergent ces dernières années, et aujourd’hui, tout le monde aspire à de la proximité, de la petite surface, des lieux de vie plus agréables et moins anonymes

La chaîne des dépanneurs a déjà dépassé ses frontières au début du XXI° siècle en rachetant un grand nombre de « petits » concurrents aux États-Unis Elle s’est implanté en Scandinavie, en Europe orientale et en Russie en mettant la main sur les 2.300 supérettes du groupe norvégien Statoil en 2012. Par ailleurs, plus de 2.200 magasins sont indirectement exploités sous licence en Asie et au Moyen-Orient.

Le concept conjuguant la disponibilité (horaires) la proximité (éviter les longs déplacements à la clientèle), la diversité (gamme de produits limitée mais essentielle au quotidien) triomphe du gigantisme à la Française. Une revanche de « l’épicier » sur le « financier ». Avec plus de 1000 implantations d’hypermarchés dans le monde Carrefour risque bel et bien de payer au prix fort comme d’autres grande enseignes la crise actuelle.

Je ne pense pas revenir chez un « dépanneur » de sitôt. Habiter dans un aussi chouette centre-ville comme Créon me permet néanmoins d’en retrouver les sensations. La baguette ou le financier de chez José sont quand même plus goûteux que le pain de mie et le muffin de « Couche Tard. »

L’expresso ou le rosé du Bistrot des Copains ont bien plus de charme que l’énorme café en gobelet ou la bière en packs d’un « Rapido ». Le Brie fermier de L’Atrappe-souris permet aisément d’oublier le Cheddar de « Voisin »…. C’est certain nous reviendrons à cette proximité si rassurante et qui réchauffe même quand toute la société à très froid.

Cet article a 2 commentaires

  1. J.J.

    A Bruxelles il existe(ait ?) des magasins de ce genre dans les quartiers, je ne me souviens plus de leur nom, Mais on y trouve pas mal de des produits locaux, de la bière artisanale excellente par exemple.
    Et l’employé m’avait dit en posant mes bouteilles dans mon sac, avec son bel accent local : « Et n’oubliez pas de rapporter les vidanges(les consignes ) !

    « C’est certain nous reviendrons à cette proximité si rassurante et qui réchauffe même quand toute la société a très froid. »
    Puisses tu dire vrai, Jean Marie !

    Ton dernier paragraphe a tout d’u sonnet des « Regrets » de du Bellay.

    …Plus me plaît le séjour qu’ont bâti mes aïeux,
    Que des palais Romains le front audacieux,
    Plus que le marbre dur me plaît l’ardoise fine :

    Plus mon Loir gaulois, que le Tibre latin,
    Plus mon petit Liré, que le mont Palatin,
    Et plus que l’air marin la doulceur angevine.

  2. pontoizeau-puyo martine

    Bonjour Jean Marie.
    j’appelle de tout mon cœur le retour de ces magasins de proximité qui peuvent permettre au monde rural de s’approvisionner en toute quiétude sans avoir à faire de longs trajets en voiture. j’appelle les géants de la grande distributions à ré-ouvrir ou à ouvrir des épiceries de proximité( comme au Canada), sous le nom de leurs enseignes : Leclerc, Carrefour, Super U, Intermarché, etc…..et à pratiquer des prix attractifs. n’oublions pas que ce sont eux qui ont coulé les commerces de proximité . Il faudrait qu’ils revoient le prix des produits, car en fonction de la taille du magasin il y a des différences énormes, alors que les centrales d’achats négocient des prix très serrés. Entre CARREFOUR Libourne et Carrefour Contact Targon les différences sont énormes. Ce sont donc à eux de redynamiser les campagnes, et là ou le peuplement est rare à remettre des fourgons en marche pour apporter les produits de 1ère nécessité à ces territoires loin de tout. j’ai déjà écrit à Michel Edouard Leclerc, j’attends sa réponse.

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