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Nous ne vieillirons pas nécessairement ensemble

Il y a un monde qui sépare chaque jour davantage l’action publique sur le terrain et les débats faisant vivre les grands médias. Les annonces quotidiennes de sommes astronomiques pour s’attirer les faveurs de telle classe sociale ou de tel secteur d’activité n’ont plus aucune crédibilité. Quand il faut simplement, à la base, on se retrouve confronté aux besoins du moindre service rendu au public la vérité ressemble à une voie vers l’avenir aussi fiable qu’une piste dans la jungle équatoriale. Des trous, des manques, des chausse-trapes, des fragilités, des inconnues de toutes sortes constituent en effet le quotidien des gestionnaires. Il en est ainsi dans le secteur du grand âge. 

Les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) sortent par exemple de la crise sanitaire en fâcheuse posture. D’abord parce que leur réputation a été mise à mal par les multiples messages officiels sur le niveau de la mortalité constatée au début de la pandémie. En effectuant des statistiques séparées de celles du grand public, les autorités ont stigmatisé les lieux de vie des résidents. Ils se retrouvent avec une image de « mouroirs » extrêmement négative alors qu’une large majorité à su juguler le coronavirus.

Déjà malmenés par le sentiment que l’entrée dans ce qui ne sont plus des « maisons de retraite » mais des établissements de plus en plus médicalisés pour atténuer les conséquences de maladies en progression constante, les EHPAD ont « mauvaise réputation ». Ils auront beaucoup de mal pour certains d’entre eux à atténuer l’appréhension légitime des gens âgés en perte d’autonomie. D’autant que la communication « officielle » vise à développer le maintien à domicile qui a ses limites. Si elle est bien conçue et si elle est ouvert et à taille humaine une structure apporte souvent sérénité et sécurité dans un contexte confortable.

Les difficultés viennent des modalités de financement de ces EHPAD qui dépendent de trois sources différentes : la sécurité sociale pour la partie soins, le conseil départemental pour le secteur hôtelier et les résidents pour une part variable. En effet pour déterminer le prix de journée complète permettant juste d’équilibrer les comptes, les calculs deviennent chaque année plus compliqués. Des ratios difficiles à suivre, des moyennes pondérées, des répartitions peu logiques du personnel finissent par nier le seul aspect qui compte : l’humanité de l’accueil.

En fait au moment de voter un budget il faut supputer des crédits potentiels faisant que l’on ne peut vraiment être certain des prévisions que quand l’exercice…est terminé ! L’exercice est purement théorique mais doit être sincère et véritable alors que l’agence régionale de santé de décidé que des mois après l’envoi du document voté ! Que ce soit pour le service public ou pour les associations à but non lucratif, l’année 2022 pouvant ramener à une gestion « normale » s’annonce difficile.

Manque de personnel qualifié (infirmières et aide-soignantes), grande fatigue générale, difficultés de recrutement, augmentation des charges liées à des justes mesures prises en faveur des rémunération mais dont on ignore toujours les conditions de financement (aide-soignantes), nombre de journées potentielles en baisse, nécessité de rester dans des prix raisonnables (1) : l’exercice ressemble à un numéro de funambule. Or la loi sur le « grand âge » attend avec dit-on une transformation des EHPAD en établissements encore plus médicalisés et post-hospitalisations. Les crédits arriveront mais ça prendra un certain temps ce qui réjouit les banquiers puisque certains ouvrent des lignes de trésorerie pour payer le personnel !

Il y a, dans ce contexte tout à fait incertain, suffisamment de demandes d’hébergement dans l’EHPAD public « ressources » de Créon (2) pour le doubler ! Le vieillissement massif de la population française dans les prochaines années ne va pas diminuer cette pression. Les admissions peuvent prendre plusieurs années puisque la durée du séjour dans l’établissement des personnes présentes ne cesse de s’allonger. C’est une vraie satisfaction !

Le projet de proximité ne cesse de s’améliorer (3) grâce au dynamisme à tous les niveaux du personnel. Imaginé au début de ce siècle sur le principe de la vie d’un hameau avec ses services et sa vie collective, « La Peloue » a franchi sans trop de difficultés les crises mais son avenir reste fragile tant les incertitudes s’accumulent. Bien évidemment depuis des semaines les débats portent sur des sujets aussi capitaux que le permis à points, la limitation de vitesse, le port du voile, le grand remplacement, la réhabilitation de Pétain, les changements des prénoms… et tant d’autres saloperies populistes.

  1. 61 € par jour

  2. Plus de 200 dossiers d’admission en attente

  3. Création prochaine de logements inclusifs. Candidature à la création d’un tiers-lieu ouvert

Cet article a 8 commentaires

  1. Philippe LABANSAT

    Je suis de ceux qui n’ont pas le premier centime à consacrer à une entrée en EHPAD, et qui se refuse à voir passer dans la poche de ce qui est, bien souvent devenu une vulgaire entreprise capitalistique, le fruit du labeur de plusieurs générations.
    La question qui taraude et devrait tarauder de plus en plus de monde, c’est : comment se supprimer proprement quand l’heure sera venue ?

    1. Bernie

      Bonjour Philippe,
      Tu as tout à fait raison. A l’heure actuelle, ce sont les hypothèques qui permettent aux ehpad de gérer leur fonds. Pour les vieux c’est le degré de dépendance (GIR) calculé par une ou des responsables administratifs qui fixe le montant mensuel à payer. C’est
      Vraiment : inapproprié aux vieux pauvres.

      1. Bernie

        Les mouroirs n’existent pas. Il est impossible de mourir dans la dignité.
        Les biens immobiliers sont hypothéqués pour redistribuer l’argent à l’Etat en échange de soins pour les vieux pauvres. Le covid sert pout améliorer la prestation. Les chambres à 2 lits sont supprimées pour être remplacées par des chambres à 1 lit avec tv, salle de bain, WC d’où augmentation du prix.
        C’est une organisation collégiale et la personne de confiance doit prendre en considération les changements d’aménagement.

        1. Laure Garralaga Lataste

          @ à Bernie
          C’est entre autre raison… parce que les mouroirs existent que nous militons pour « le droit de mourir dans la dignité » !

        2. J.J.

          « Les biens immobiliers sont hypothéqués pour redistribuer l’argent à l’Etat en échange de soins pour les vieux pauvres.  »
          Si c’était le cas il n’y aurait que demi mal. Malheureusement ce sont des entreprises capitalistes privées qui le plus souvent rackettent les bénéfices.

  2. Dany+Cazeaux

    Les EHPAD, n’ont rien d’un lieu de bien vivre, mais de survivre. Se retrouver avec des déments, sans regard péjoratif, avec des personnes plus handicapés que soi, devoir chercher longtemps une blouse blanche,
    Il vaut mieux ne pas être incontinent. L’alimentation d’usine privée, une façade faisant croire à de bonnes intentions…. Il n’en n’est rien de tout ça. Quant au prix,2100 € par mois, que peu de résidents peuvent assumer, ce sont les enfants et petits enfants qui font le complément. Mais souvent, déjà en retraite, les enfants sont obligés de mettre dans la facture, leur bien immobilier.
    Non, être obligé de vivre dans de telles structures, est vraiment vivre dans un mouroir. Il faut ne pas avoir le choix. Honte à ces gouvernants, qui tuent nos parents, grands parents…. Indécent

  3. Bruno DE LA ROCQUE

    Mon expérience (non pas en tant qu’octogénaire pour le moment jardinant encore chez lui) date. C’est celle de mon père entre 2005 et 2007, année de son décès à 96 ans. Il était dialysé, depuis 2001 me semble-t-il, d’où une certaine surveillance médicale mais pas de gériatrie… Mais là n’est pas mon propos.
    L’EHPAD avait un statut associatif, donc ne rémunérait pas un actionnariat quelconque, et une bonne image au Département (c’était dans le Calvados). Il convient de rappeler que c’était à l’époque, ou peu après, du transfert de charges et de missions aux départements sans que les dotations budgétaires soient suffisantes pour assurer et assumer ces missions…
    eu après l’arrivée de mon père dans l’établissement, une aide-soignante m’avait expliqué que son métier avait bien changé depuis son entrée dans le métier. Pour résumer : « Aujourd’hui les pensionnaires arrivent de plus en plus âgés et dépendants que jadis. L’augmentation de l’espérance de vie s’accompagne hélas pour notre métier d’une moindre autonomie des personnes (toilette, mobilité, vie sociale et culturelle, expression des besoins…). Nous ne sommes pas assez nombreu(ses)x. ».
    Autre découverte pour moi, mon père était soumis à la Taxe d’Habitation : je n’avais jamais réalisé qu’il était l’occupant d’une surface locative…
    Mes conversations avec l’équipe médicale du centre d’hémodialyse et de néphrologie m’ont confirmé que rien dans l’enseignement médical ni dans l’organisation du milieu hospitalier ne prenait en compte la gériatrie.
    Finalement, la dialyse a permis à mon père de décéder sous surveillance médicale : l’EHPAD m’avait appelé pour me dire que, partant pour la dialyse, mon père « sentait » la mort ; l’hémodialyse m’a appelé pour me dire que vraisemblablement c’était la fin et que mon père serait installé dans une chambre du service d’angiologie (qu’il avait plusieurs fois fréquenté pour cause de thrombose liée à l’accès du cathéter lors des dialyses). C’est évidemment là que je l’ai trouvé pour ses dernières heures, quasiment inconscient… Effectivement, c’était plus raisonnable qu’un retour à l’EHPAD (15 km) et plus sécurisant.

  4. Laure Garralaga Lataste

    Coucou, me revoilà après 3 « Roues libres » d’absence… et sur quoi je tombe ? Sur ce mot que je déteste : EHPAD, et que je ne fréquenterai (j’espère) JAMAIS ! Vous allez croire que je vous raconte des histoires… Ayant trouvé un EHPAD qui acceptait de prendre pour une semaine ma très chère maman qui vivait avec nous, Laura qui avait 93 ans trouva la bonne occasion de me quitter le jour de mon anniversaire (le 7 février). J’ai compris qu’elle ne me remerciait pas de l’avoir abandonnée…
    Il faut dire que c’était une sacrée Nana !

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