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Bas les masques « halloweenesques »

Des diablotins munis d’un trident en matière plastique, des fantômes enveloppés dans un morceau de drap tiré de l’armoire de mamie, des sorcières jeteuses de sorts artificiels ou des zombies au visage porteur des stigmates d’un passage outre-tombe : des groupuscules de gamins ont tenté de nous persuader que la peur pouvait nous contraindre à payer une rançon en bonbons. Halloween a ses adeptes juvéniles près à toquer aux rares portes éclairées pour garnir une escarcelle à friandises de suprremarchés largement ouverte. En retrait des adultes scrutent le fruit de leur mendicité américanisée. Les enfants ou les pré-ados tentait hier d’exister par l’effroi ou le déguisement.

Ont-ils conscience du sens de cette démarche que leur impose un système social reposant de plus en plus sur des « coups » commerciaux montés par le monde du profit? Tout au long de l’année défilent les « journées de… » dont nul ne sait vraiment quel impact elles ont sur l’opinion mais ne constituant le plus souvent une niche commerciale. Les fêtes instituées par toutes les religions et que nous acceptons comme références entrent dans ce catalogue utile aux marchands des temples de la consommation.

A toutes les époques le déguisement ont procuré un plaisir particulier à celles et ceux qui le pratiquaient. Les adultes l’avaient même confisqué en organisant les fameux bals masqués leur permettant d’échapper à toutes les convenances. Il y avait une forte envie de s’amuser, de briser le carcan de la période du Carème imposée par une conception punitive du catholicisme. Le défouloir d’« Adieu la chair » ne cherchait nullement à apeurer mais incitait par sa pratique, au partage le plus large possible.

Défier le pouvoir religieux par la transgression réjouissait bien des « contraints » par ses directives. La liberté donnée par un masque sophistiqué ou immaculé, un costume fastueux ou modeste, un loup inoffensif ou agressif, constituait un vrai privilège. Des villes entières s’enflamment encore pour leur carnaval ayant retrouvé ses racines païennes. De Venise à Dunkerque, de Rio à Nice, de Québec à Tournai, de Cadix à Bogota… les foules oublient durant des périodes plus ou moins longues les vicissitudes du temps présent. La peur n’existe jamais.

Halloween a tenté une percée il y a plus d’une décennie. La pression économique a été montée d’un cran. Il sera très difficile de savoir si la crise sanitaire a définitivement tué dans l’œuf cette soirée que l’on doit à l’esprit contestataire des Irlandais et des Écossais l’ayant importé lors de leur migration vers ce qui allait devenir leur nation. Depuis des mois et des mois le port du…  « masque » a déjà transformé tout l’espace public en un gigantesque rassemblement anonyme. La donne sociétale sur ce rendez-vous a Totalement changé.

Étrange période que celle que nous traversons où les frayeurs viennent d’un virus qui refuse d’abandonner le devant de la scène, ramenant le monde à l’époque des pandémies incontrôlables. Les consignes de distanciation sociale et de port de ce « cache-visage » plus ou moins esthétique ont fait que désormais se masquer est devenu d’un désarmante banalité. Nous avons tous appris à chercher dans un regard à identifier celle ou celui que nous rencontrons dans la rue. L’anonymat s’institutionnalise mais ce n’est pourtant pas de gaîté de cœur que l’on dissimule son visage. Alors les groupuscules « halloweenesques » ont été rares cette année comme si les jeunes et moins jeunes craignaient un accueil peu convivial. Halloween s’estompe. 

Les escapades de Carnaval dans les villages dans l’après-guerre ainsi que les rassemblements organisés durant lesquels il fallait rivaliser d’ingéniosité pour se confectionner un costume original avaient une dimension joyeuse. Beaucoup ont disparu car démodés et réclamant surtout tellement de précautions que les organisateurs se raréfient. La tendance pour le surnaturel, le diabolique, le gore ou le morbide ne cesse de progresser. Elle supplante l’humour, la dérision, la caricature ou la vie. Holloween tente d’exploiter cette mutation. Alors bas les masques !

Cet article a 17 commentaires

  1. Bernie

    Le port du masque est une obligation dans les magasins. Il faut suivre cette obligation. La réciprocité n’est pas uné la fête des enfants. Les adultes se doivent d’y faire référence. Halloween est bien la fête des enfants.

    1. Laure Garralaga Lataste

      @ à Bernie
      Je croyais que Noël était la fête des enfants… !

      1. Bernie

        Ah la croyance, c’est une histoire rocambolesque!
        Croire ou ne pas croire c’est la laïcité

  2. Bernie

    J’oubliais la COP26 et la convergence des eaux montantes et descendantes.
    Toutes et tous avec Greta Thunberg

  3. christian grené

    Bourdieu, Jean-Marie! Qua ça fait du bien, de bon matin, de lire cet article au goût de café et croissant chauds. J’ai eu l’impression de prendre mon p’tit dèj’ avec Edgar Morin et, plus près de nous, François Dubet.
    Merci Jean-Marie. Je sais que ma journée sera belle. Ad’ taleur!

  4. Philippe Labansat

    J’avoue que je ressens un profond mépris pour ces prétendues « fêtes », qui puent le business moisi, made in USA.
    Que ce soit pour la « Halle au vin » (ça, ça marcherait mieux), ou même Noël (avec son père Noël devenu rouge Coca Cola), nous sommes abreuvés de pubs truffées de références ou même de comptines yankees qui ne peuvent que nous laisser de marbre. Tout ceci n’a aucune racine culturelle chez nous.
    Ces pauvres gamins qui viennent tirer les sonnettes font plutôt pitié que peur dans leur application à suivre les consignes véhiculées par des commerciaux épaulée par la pub télévisuelle.
    J’avoue aussi que les savonnettes politiques que l’ont essaye de nous refiler, avec les mêmes « forces de vente », font tout autant pitié.
    Souhaitons qu’elles ne finissent pas par nous faire peur…

    1. Laure Garralaga Lataste

      @ à Philippe

      Je partage totalement, mais, quand tu étais gamin, n’as-tu pas attendu les cadeaux du père Noël avec impatience ? Et n’avais-tu pas hâte de les voir au pied du sapin ou, pour les plus anciens dont je suis, devant la cheminée ? Et oui, à mon époque nous avions une cheminée ! Et, déjà pragmatique je m’interrogeais : comment a-t-il pu passer par ce tuyau étroit avec tous ces cadeaux ? !

  5. J.J.

    Histoire de remettre les pendules à l’heure (c’est le moment !).

    La tradition d’Halloween, importée aux Amériques par les Irlandais est en fait un tradition celtique qui remonte probablement aux temps préhistoriques. C’était chez les Celtes la fête de Samain qui correspond à la prise de conscience de la diminution du temps de jour, de la afin des récoltes et aussi rites de passage et rappel du culte des ancêtres(récupéré par la Toussaint chrétienne).
    D’aucuns y ont vu également une tradition influencée par les philosophes grecs avec lesquels les Celtes entretenaient des relations, en particulier les druides.

    Sans que cela relève comme maintenant d’une véritable institution, à cette saison, souvent les enfants ou les jeunes gens dans les campagnes creusaient une citrouille (qui avait probablement remplacé avantageusement une rave ou une betterave), la munissaient d’une bougie et l’installaient à une croisée de chemin par exemple, pour effrayer le malheureux piéton qui cheminait dans la nuit.
     » Je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans, (et même de moins de 50 ou 60 ans) ne peuvent pas connaître. »

    Nous sommes loin de la chienlit que nous impose la société dite de consommation.

    1. Bernie

      Bonjour,
      La citrouille est un légume dont sa chair est utilisée pour réaliser de bonnes recettes.

    2. Laure Garralaga Lataste

      @ à J.J.
      Merci pour l’historique d’Halloween. Donc, j’en déduis que cette fête est plus ancienne que le père Noël ! J’attends décembre pour passer commande à Jean-Marie… qui, je n’en doute pas, nous fera un cadeau : éclaircir ce mystère…

  6. Bernie

    Si vous avez un peu de place dans votre jardin, semer les graines au mois d’avril et vous deviendrez producteur de citrouille.

    1. Laure Garralaga Lataste

      @ à Bernie

      La place ne suffira pas… Il faut y ajouter « la main verte » !

      1. Bernie

        La main verte ? C’est quoi ?

  7. christian grené

    A côté de Bourdieu, Morin et Dubet, j’adjoint J.J. Même si c’est plus l’heure du p’tit dèj’ mais de l’opéra.

  8. christian grené

    Pardon, M. le maire: « j’adjoins ».

  9. Bernie

    Jean-Marie, Merci de ne pas faire la confusion entre le masque protecteur et Halloween.

  10. christian grené

    « Allo? »
    -« Oui..nnnnnnnn »
    « … »
    -« Encore un emmerdeur. Et à l’heure de l’opéra… »

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