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Le précédent du Beaujolais et de la cancoillotte

Il est certain que l’on doit se méfier du Beaujolais nouveau dont les véritables amateurs de vin refusent de reconnaître la moindre qualité gustative. Phénomène de mode et outils de marketing ce breuvage dont parait-il raffolent les Japonais ne tient que parce que des « experts » en lever de coude occasionnel lui trouvent des arrières-goût de violette, de banane, de fruits rouges, de framboise ou de fraise (tagada?) au gré des dégustations. Plus de 17 millions de bouteilles ont été produites en 2021 avec l’espoir que la pandémie n’entrave pas ces soirées festives où l’on se presse à minuit dans les cafés en vogue pour le premier verre.

Dans un charmant village du Jura ils ont eu la belle idée de maintenir le lien social en alliant dans une soirée familiale le breuvage sorti des cuves de la région voisine avec la fameuse cancoillotte. Un plat robuste constitué de fromage obtenu à partir d’un mélange de « metton » (lait écrémé caillé) et d’eau, additionné de beurre en fin de préparation. Actuellement les maires sont sous pression car les organisateurs de réveillon frappent aux portes des mairies pour expliquer que leur manifestation, comme celle du jura, sont essentielles pour que la France garde le moral.

L’un d’entre eux m’a confié avoir été interrogé pour savoir s’il autoriserait un rassemblement festif de près de 200 personnes dans une salle des fêtes. En attirant l’attention de l’organisateur sur les dangers que représentaient une telle concentration de personnes il eut la surprise de l’entendre protester sur une sévérité excessive. Et alors quand il annonça qu’il interdirait ce « réveillon » il eut droit à une bordée de reproches sans aménité. C’est probablement là que se situe une grande part des dangers actuels de la pandémie.

Dans la bourgade jurassienne plus d’une centaine de malades ont été recensés sur les 323 habitants du village. Ces derniers jours, la commune a été touchée de manière particulièrement virulente par le Covid-19 puisqu’un tiers de ses administrés a donc été contaminé. Parmi eux, une personne a été placée sous oxygène tandis que 70 autres n’ont ressenti que des symptômes légers et sont désormais soignées. L’origine de cette contamination explosive n’a aucun rapport avec le Beaujolais nouveau même si certains complotistes « défenseurs d’un vin que qualité » s’en empareront pour le discréditer.

Bien évidemment toutes les précautions avaient été prises » et comme le menu typique n’attirait pas la jeunesse et la majorité des convives, âgés pour la plupart de plus de 70 ans, étaient vaccinés. Il y avait cependant quelques enfants qui deviennent suspects d’avoir transmis le virus à une grande partie de l’assistance « captive ». Il y a un an la Covid-19 mobilisait l’attention dans les EHPAD où l’on avait « consigné » les résidents pour les fêtes de fin d’année afin d’endiguer les morts. Fermés à double tour ces établissements devenaient des « prisons » pour des personnes âgées marquées par un isolement affectif déjà douloureux en temps « normaux. »

Cette pandémie brise tous les repères et accentuent une modification des comportements sociaux. Il faut craindre que jamais le « mieux vivre ensemble » ne revienne à son niveau antérieur qui n’était déjà pas très élevé. La suppression des moments de partage se prolonge. Il ne saurait en être autrement dans le contexte où on commence à parler de… sixième vague. Et encore une fois la responsabilité de cet abandon de ce que dans les années 80 on dénommait la convivialité va incomber aux maires. Ils sont chaque jour en première ligne avec le mauvais rôle à assumer. En interdisant ils se fâchent avec les instigateurs de la fête. En acceptant ils prennent le risque réel d’être accusés de laxisme et d’avoir à justifier un éventuel cluster.

Dans le Jura, pour le maire de la commune, les mesures anti-Covid avaient été parfaitement respectées lors de cette soirée. « Il y avait des consignes qui étaient bien spécifiques, le passe sanitaire ( …) et tout ce qu’il fallait. La salle des fêtes a été aérée régulièrement, vraiment on est restés dans les normes. Comment ça s’est développé? On ne sait pas, le mystère reste entier » explique le premier magistrat. Interrrogés les habitants ne regrettent rien ou pas grand chose si l’on se fie aux micros tendus vers les partcipants aux agapes. Alors que demande le peuple : pas de vaccin mais du Beaujolais, de la cancoillotte et des fêtes… 

Cette réalité jurassienne va cependant  générer une kyrielle d’annulations de ces fameux réveillons de fin d’année symboles d’insouciance et d’espoir. Comment pourrait-il en être autrement ? Dans le fond ce sont les vendeurs de champagne, de saumon, de coquilles Saint-Jacques, d’omelette norvégienne et de cotillons qui vont solliciter une aide « quoi qu’il en coûte » . Ceux du Beaujolais nouveau et de la cancoillotte sont sauvés même si les experts ont mis en garde : les tests le prouvent ce ne sont pas eux-aussi des vaccins efficaces.

Cet article a 2 commentaires

  1. J.J.

    « Le beaujolais nouveau est arrivé » : un roman de René Fallet, copain de Georges (vous voyez lequel ?) auteur de la mémorable « Soupe aux Choux ».
    La façon dont ce beaujolais populobobo est actuellement exploité par le commerce et la toute puissante pub, ne me semble pas vraiment en accord l’ouvrage qui l’a inspiré.
    Quant aux mesures dites barrières, si la distanciation physique n’est pas toujours bien respectée, la distanciation sociale est largement pratiquée par les classes possédantes.

  2. Laure Garralaga Lataste

    @ à J.J.
    … Celui de Brive la Gaillarde ? !

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