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La générosité bien ordonnée envers les candidats malheureux

Si avec les textes en vigueur sur le financement des campagnes ainsi que des partis politiques officiels on a beaucoup avancé en matière de vie publique il faut tempérer ce constat par les réalités. Ce paramètre rarement expliqué dans les médias conditionne en effet bien des prises de position… qui n’ont rien d’idéologiques. Qui se souvient que le financement de la vie politique a été revu en 1990 à l’initiative de… Michel Rocard afin de moraliser la vie publique après différentes affaires? La loi de 1990 affecte aux partis un financement sur fonds publics au prorata de leur nombre de suffrages enregistrés et de leur représentation parlementaire, elle plafonne les dons comme les dépenses de campagne et met en place une commission nationale de contrôle des financements politiques. Il y a eu des ajustements par la suite mais le socle a été posé par Rocard.

Les termes de la loi ont été allègrement contournés sur le montant maximum des dépenses et sur les dons sans que le résultat des élections soient mis en cause, détruisant de fait l’impact des lois. Deux élections présidentielles plus tard les condamnations ne sont pas définitives… ce qui laisse la place à toutes le supputations. L’affaire Bygmallion traîne toujours. Après la décision du Conseil constitutionnel de rejeter les comptes de campagne de Nicolas Sarkozy en 2012, l’UMP avait lancé une « grande souscription nationale » sur son site internet. L’objectif de couvrir les 11 millions d’euros avait été relevé en moins de deux mois plus tard grâce à ce « Sarkothon ». Personne n’avait vraiment décortiqué la supercherie de cette opération  « charitable ». Enfin presque.

Cette fois c’est au tour de la candidate LR qui n’a pas réussi à passer la barre fatidique des 5 % lors du premier tour de l’élection présidentielle, alors qu’elle était créditée à plus de 10 % dans les sondages il y a encore quelques semaines de se lancer dans le même processus. Elle a en effet un trou de 7 millions d’euros de son budget de campagne qui ne seront pas remboursés par l’Etat, comme le prévoit la loi. En effet elle perd un remboursement à hauteur de 47,5 % du plafond des dépenses, soit l’équivalent de 8 millions d’euros.

En revanche, les huit candidats qui n’ont pas dépassé les 5 % des suffrages exprimés au premier tour ne peuvent prétendre qu’à un remboursement bien moins élevé, à hauteur de 4,75 % du plafond des dépenses. Cela équivaut à 800 000 euros seulement. Une somme dérisoire pour les partis comme Europe Ecologie Les-Verts, Les Républicains ou le Parti socialiste, qui ont dépensé plusieurs millions depuis le 1er juillet 2021 dans leur campagne présidentielle. Comme elle avait dépensé à peu près 13 millions il lui en manquera 7. Même situation chez les Verts mais à un degré moindre puisqu’ils n’avaient engagé sur emprunt que 7 millions pour s’assurer le remboursement. Ces sommes laissent rêveurs ! Essayez donc d’emprunter sur la base d’un résultat électoral… et vous verrez si les banques se fient aux sondages !

Jusque-là rien de bien nouveau. En 2015, Jadot alors à quelques 2 %, en annonçant son désistement en faveur d’Hamon avait négocié une prime substantielle destinée à rembourser les « frais qu’il avait déjà engagés ». Cette fois lui-aussi s’effondre et  laisse une nouvelle ardoise.L’appel à une récolte de 2 millions a donc été lancé puisque là-aussi seulement 800 000 € viendront de l’Etat. Du moins en apparence. Tant chez Pécresse que chez Jadot on s’est en effet précipité pour lancer un SOS… Ils auraient même pu solliciter la générosité dans leurs déclarations de 20 heures s’ils avaient pu le faire. En effet les comptes du premier tour de la campagne s’arrêtent avant le neuvième vendredi après le second tour soit théoriquement avant le 24 juin. Et il faut aller vite pour que ce soit rentable !

Vu le temps nécessaire à l’établissement des documents destinés à la commission de contrôle il faut que les fonds rentrent très rapidement . Et c’est l’intérêt de tout le monde. D’abord celui des partis qui ont à financer les législatives de Juin. Ensuite pour les emprunteurs qui se voient mal sortir toute leur trésorerie dans une période où le nombre de militants réel est en chute libre et donc les cotisations aussi. Enfin, dans le cas de Pécresse c’est la mise en danger des 10 millions de son patrimoine personnel. L’appel n’est donc pas innocent quand on connaît le code des impôts. En effet il faut préciser que les sommes collectées iront dans les comptes de campagne des candidats…

Pourquoi ? Depuis la loi du 19 janvier 1995, les dons consentis par une personne pour le financement de la campagne électorale d’un ou plusieurs candidats peuvent atteindre 4600 € pour les mêmes élections (ensemble des scrutins d’un même type). Ces versements ouvrent droit à une réduction d’impôt au taux de 66 % ! Une aubaine pour celles et ceux qui souhaitent en 2023 augmenter leurs réductions d’impôts sur le revenu. D’autant qu’avec la cotisation au parti (déductible à 60 %) vous pouvez donner 15 000 € par foyer fiscal ce qui représente un don réel de 5 000 € !

Actuellement les Verts et LR ont cumulé officiellement 3 millions de dons… et donc l’Etat grâce à ce système perdra pour le moment près de 2 million de déductions fiscales. Si la générosité persiste et les objectifs sont atteints ce sont 6 millions qui très légalement récompenseront la générosité militante (enfin presque). Dépêchez-vous plus que 3 ou 4 semaines ! 

Cette publication a un commentaire

  1. christian grené

    Bonjour à tou(te)s.
    Je n’entends rien à la politique. Je n’écoute que mon corps pour lequel ce bon docteur Diafoirus m’a prescrit un traitement qui a plus de 2 000 ans: sangsue-raie. Loin, très loin des requins de la finance.

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