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« Un homme sans mémoire est un homme sans vie »

Propos tenus en tant que Président lors du rassemblement annuel de Gironde Citoyenne, devant le monument dédié au massacre effectué par la division Das Reich sur Blasimon et Mauriac en 1944 : 

« Toutes les mémoires ont besoin des cailloux blancs sur les chemins de la vie pour retrouver le bon sens du retour dans la maison des valeurs. Sans ces moments solidaires, et nous le constatons chaque jour combien ils manquent, les peuples sont condamnés à mourir lentement mais inexorablement, de froid. Depuis pas mal de temps nous empruntons pourtant toutes et tous d’une manière ou d’une autre, les autoroutes fléchées du présent nous permettant croyons nous, d’atteindre vite un objectif lointain sans efforts et sans réflexion.

C’est la facilité idéologique qui nous pousse les uns et les autres à filer vers des certitudes que nous pensons rassurantes. Elle nous conduit souvent à oublier que l’on n’atteint les sommets que par des sentiers pentus et malaisés et jamais par les grandes routes balisées par un système qui nous impose des directions improbables. Pour connaître ces parcours exigeants il est indispensable de les pratiquer en permanence, des les débarrasser des ronces, des orties, des herbes folles de la pensée unique et de faire attention à chaque pas car le ravin du renoncement est proche. Il nous faut retrouver le sens de l’effort, l’envie de convaincre et le courage de partager. C’est la raison pour laquelle depuis maintenant huit ans nous maintenons grâce à vous, ce rendez-vous auprès ce monument de Mauriac tellement chargé de symboles.

Nous voici donc une nouvelle fois rassemblés, 20 ans jour pour jour après qu’un million de Français aient défilé dans les rues après un scrutin national ayant vu la tache de la peste brune s’étendre comme celle des produits pétroliers s’échappant sur la surface de la mer des réservoirs des navires naufragés. Nous ne sommes loin de la même mobilisation du 1° mai 2002 et rien ne serait pire que de renoncer. La pollution actuelle des esprits ressemble en effet étrangement à ces marées noires qui se glissent partout, dans tous les recoins, dans toutes les zones où on les attend le moins. Elles progressent inexorablement avec la complicité du monde du silence et ne s’arrête que quand les cuves sont vides. Ils semble que ce soit éternel. 

Nous voici une nouvelle fois rassemblés quand l’horreur de la guerre, la résurgence des massacres de civils, des mots de génocide, de torture, d’exécutions sommaires, de viols envahissent notre quotidien. Jamais nous n’avons été aussi près de la folie inhumaine des années ayant précédé  la seconde guerre mondiale : non respect des frontières établies, mépris total des principes de liberté de choix des peuples,  inefficacité complète des structures mondiales de régulation des conflits et menace de généralisation de la guerre qui apeure le reste de la planète. Combien de monuments comme celui de Mauriac faudra-t-il un jour ériger en Ukraine ?

Celui-ci, solitaire  au cœur de cet Entre-Deux-Mers, terre qui fut celle de l’essentiel de la Résistance girondine est à l’image de ceux dont les noms sont gravés dans la pierre : simple, digne, courageux, droit et surtout témoin permanent de l’atrocité que porte tout le temps armée ivre de vengeance, de haine et de mépris de la vie humaine.Les racines de toutes les guerres se trouvent toujours dans l’intolérance, le racisme, l’exclusion, le nationalisme brutal et une volonté hégémonique portée par la propagande et plus encore dans la passivité de celles et ceux qui croient que ce qui est arrivé ne reviendra pas

Joseph Costa, Jean Gastard, l’abbé Maurice Gréciet, Pierre Habri, Jean Koloski, Alexandre Laurier, Guy Lozano, Antoine Simert étaient enfants du peuple de France, forts de leurs origines diverses et de leurs différences. Ils n’étaient ni artistes ou sportifs millionnaires, ni oligarques français, ni commentateurs pour plateaux de télé-perroquets. Ils ont été massacrés dans des conditions horribles pour simplement s’être trouvés sur la route de SS qui ne l’oublions pas resteront impunis. 

A Boutcha, à Marioupol dans la banlieue de Kharkiv sur leur chemin des hordes d’hommes loups pour les Hommes se comportent exactement de la même manière. Quels idéees sont derrière eux ?Toujours les mêmes, exprimées différemment, travesties ou parées de ce nationalisme mortifère. Le navire des idées destructrices vomit toujours sa marée brune, rouge ou noire recouvrant les consciences.

Nous devons donc humblement le respect à ces hommes de l’Entre-Deux-Mers qui ont payé de leur vie pour que nous puissions rester des citoyens.

Nous leur devons d’être solidaires dans le combat contre toutes les formes d’oppression, de cruauté, de propagation du virus de l’inhumanité.

Nous leur devons d’être conscients de notre responsabilité face à la montée du national-populisme sur notre territoire et partout où sont installés la peur du lendemain, le sentiment d’abandon, la précarité économique ou culturelle.

Nous leur devons de ne pas sombrer dans les querelles partisanes étriquées.

Nous leur devons l’unité, l’indépendance et la démocratie.

Nous leur devons d’être à notre manière, avec nos moyens, avec nos convictions des ardents défenseurs d’une République à laquelle bien trop d’autres sont indifférents

Nous leur devons de ne jamais renoncer à arpenter le sentiers de plus en plus étroits conduisant à  la liberté, à la fraternité, à l’égalité et de la laïcité.

Eux dont les noms sont gravés dans la pierre d’Entre Deux Mers ont payé au prix le plus fort la faiblesse de ces peuples n’ayant pas su résister à la montée du fascisme ordinaire, le plus dangereux, celui qui s’insinue dans tous les interstices de la société pour ensuite en prendre le contrôle..

Mes amis , alors qu’il était en fin de vie, il y aura vingt ans dans quelques jours, mon instituteur m’a confié un journal qu’il avait gardé avec l’espoir qu’il me rencontrerait un jour. Le voici.

C’est un exemplaire du Monde Diplomatique de Mai 2002 qui titrait « La Peste » sous la signature d’Ignacio Ramonet. Il m’avait fait promettre de ne jamais renoncer à combattre cette maladie des démocraties qu’en Hussard noir de la République. « Promets-moi… ». Je le lui ai promis. Je tiendrai parole aussi longtemps que je le pourrai.

Ignacio Ramonet concluait en écrivant «  Mais si, surmonté le moment de frayeur, les mêmes partis de toujours poursuivaient leur politique libérale de privatisations, de démantèlement des services publics,…bref, s’ils continuaient de heurter de front les aspirations populaires à une société plus juste, plus fraternelle et plus solidaire, rien ne dit que le néofascisme, alliés à ses collaborateurs de toujours, ne parviendra pas à l’emporter la prochaine fois… » C’était en 2002…

Les martyrs de Blasimon et Mauriac ne méritaient pas que nous n’ayons rien compris en vingt ans et ils ne comprendraient pas le résultat des élections présidentielles sur ce territoire où ils avaient construit des vie simples mais tellement précieuses que les nazis leur ont ôtées.

Nous nous sommes donnés bonne conscience il y une semaine. Est-ce suffisant ? Je ne le crois pas ! Nous verrons si nous avons la capacité à porter le message d’espoir qu’ils attendraient de nous. Nous devons résister pour eux.   “Parce qu’un homme sans mémoire selon Foch est un homme sans vie, un peuple sans mémoire est un peuple sans avenir.”  Puissions nous en persuader le plus grand nombre. Vive la citoyenneté, vive la République.

Cet article a 12 commentaires

  1. J.J.

    « Un homme sans mémoire est un homme sans vie »
    …Et un pays sans mémoire est un danger pour l’humanité.
    Je sais que je vais me faire « pelauder », comme aurait dit Montaigne, dans sa mission de conciliation entre papistes et parpaillots, mais j’estime indispensable de justement remettre un certain nombre de faits en mémoire.
    Lors de la chute de l’URSS, il avait été promis au nouvel état russe et la dissolution du pacte de Varsovie, que l’OTAN cesserait son expansion vers l’est(interviouve de Roland Dumas qui avait assisté aux pourparlers, mais dont on s’est bien gardé, dans la presse aux ordres de rappeler les propos).
    Promesse non tenue et provocations manifestes, avec toutes leurs conséquences.
    Mémoire tragiquement défaillante ou mauvaise foi patente ?

    Quant aux infos diffusées par cette même presse partisane, sous influence d’un haut dirigeant mondial qui a quelque intérêt particulier et familial à embrouiller la situation, et qui me rappelle parfois le « Radio Paris  » sous la botte nazie, il faut peut être prendre ses informations manichéennes avec prudence et circonspection. Trouver d’autre sources d’information que celle distribuées par la doxa se prétendant bien pensante demande simplement un peu de recherche (certains articles du Figaro par exemple sont parfois très éclairants !).

    1. Laure Garralaga Lataste

      @ à J.J.
      Parce que… « Un homme sans mémoire est un homme sans vie », à cette maxime j’ajouterai celle d’Aimé Césaire… « Un peuple sans mémoire est un peuple sans avenir ».

  2. MLP, avance en tenue de camouflage, elle c’est travestie du « social » tout y est le logement, le handicap, la vieillesse, le pouvoir d’achat, sous ces beaux vêtements, la puanteur de ses idées nationalistes, islamophobe, homophobe, anti-sémite, prônant l’intolérance, le racisme, la France aux français… mais n’y a t’il personne pour lui dire que « la France » d’aujourd’hui, est multicolore, multiculturelle, que l’important pour un enfant est d’être aimé, choyé, et accompagné?… papa/papa, maman/maman, maman/papa, ou parent solo? n’importe peu.. personne pour lui dire, que l’important est d’aimer, et pas « qui » on aime? et qu’un con, reste un con qu’il soit black, blanc, beurre, mulsulman, juif ou catho, (ou autres) …. que les droits de l’homme, de l’enfant, sont universels, et inconditionnels….. et que la valeur d’un homme-femme, n’est pas liée à sa couleur, à sa religion, ni de l’endroit ou il-elle est né-e. JAMAIS !

    1. J. J.

      …et qu’un con, reste un con qu’il soit black, blanc, beurre, mulsulman, juif ou catho, (ou autres) …. ou athée ….(ce qui est mon cas), et l’on est toujours le con d »un autre même si l’on essaie de faire au mieux.!

  3. Laure Garralaga Lataste

    La bête immonde avance toujours masquée! Et ce n’est qu’après être parvenue au pouvoir qu’elle montre ses muscles… : Hitler, Mussolini, Franco et Salazar.

  4. christian grené

    Bonjour à tou(te)s. Le sujet du jour est bien trop grave pour que je pousse la blagounette.
    La division Das Reich dans l’Entre-deux-Mers, c’est comme la Marine nationale dans l’entre deux tours aux présidentielles.
    Abrazos para Laura mia.

    1. J.J.

      La division Das Reich, je l’ai vue passer en 1940, je n’étais pas bien grand, je n’avais aucune idée que ce que ça pouvait être, à part voir défiler des tanks(j’ai appris bien plus tard que c’était Das Reich). Elle filait vers la frontière espagnole et ne s’était pas encore illustrée aussi tragiquement.
      En 1944 , j’ai vu passer la colonne Elster,(dans l’autre sens), avec ses soldats hindous elle n’était pas mal non plus.

  5. Cette UNION, qui se travaille actuellement, remettra, j’espère, à sa place cette extrême droite, qui remplie les urnes de la misère et de la désespérance de gens qui ne reçoivent d’écoute, que « chez elle »…. l’espoir s’accroche là ou il peut….même sur une branche pourrie.

    1. Bernie

      Bonjour Fabienne,
      Je ne pense pas que l’extrême droite remplit l’urne de misère. Non ce n’est pas cela. Il va falloir arrêter de porter des critiques amères sur l’extrême droite. Il va falloir trouver ce qui nous inquiète tant.
      Entre 2 guerres n’a jamais été aussi présent.

  6. gilles

    Je trouve les propos de ton instituteur en 2002 d’une extraordinaire lucidité sur ce qui est arrivé depuis et qui continue subrepticement… jusqu’où?

  7. Bernie

    Je sais que I. Romanet est un journaliste espagnol. Fondateur d’attac. Il fait savoir qu’il soutient jean luc Mélenchon.
    « Un autre monde est possible »

  8. Bernie

    Émission sur la 5 très intéressante
    « Sur le front de la guerre de l’eau ».
    Le recyclage de l’eau et des déchets. C’est de la poudre aux yeux.
    L’autodestruction de l’espèce humaine est en route et nous payons pour s’autodétruire.

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