Les évolution sociétales des USA ruissellent toujours en Europe et particulièrement en France dans des délais plus ou moins longs. Quelles qu’elles soient ces tendances portées par le système économique, médiatique ou même parfois politique finissent par intégrer nos habitudes de vie. Toutes les facettes de notre culture sont sous emprise américaine et le phénomène s’amplifie avec l’arrivée du numérique ou des réseaux sociaux. Notre démocratie se délite, infiltrée par des comportements ou des méthodes qui en sapent les bases essentielles. Cette « colonisation » a pourtant ces dernières heures trouvé l’exception la plus tragique qui soit avec la tuerie de Buffalo puisque selon les écrits du tireur il l’a commise au nom du « grand remplacement ».
Isolé dans la campagne américaine profonde, cet assassin ayant rédigé son « Mein Kampf » en 180 pages postées sur Google Docs a délibérément choisi de tuer des noirs au nom de son entrée en guerre pour éviter « le génocide blanc ». Considéré comme un « terroriste » par les autorités américaines il a été inspiré par le concept ressassé en boucle durant la campagne électorale…française. Rappelons que le « grand remplacement » a été introduit en 2010 dans le paysage politique par l’écrivain Renaud Camus. Elle affirme qu’il existerait un processus de substitution de la population française « historique » par une population non européenne, originaire en premier lieu d’Afrique et du Maghreb. Ce processus conduira pour lui à remplacement de la civilisation soutenu, voire organisé, par une élite politique, intellectuelle et médiatique qualifiée de « remplaciste ».
Aux États-Unis où le racisme est à son plus haut niveau cette qualification a trouvé un autre vocable : « suprémacisme blanc» mais les fondements restent les mêmes. Trump en a exploité tous les ressorts et a même vanté les mérites des porteurs de cet affrontement racial permanent. La similitude avec la France est frappante puisque si aux USA les racines se trouvent dans les idées et les actes du Ku Klux Klan chez nous elles puisent leurs forces dans l’antisémitisme de la III° République et les attaques contre les Juifs, les Arméniens, les Italiens et ensuite les Maghrébins plus communément qualifiés d’arables ! Le stade extrême de cette transfiguration de l’évolution démographique a été formalisé par le nazisme.
A 18 ans submergé par la vague trumpiste du complot, le jeune américain (citer son nom c’est lui donner une célébrité qu’il ne mérite pas!) a froidement abattu clients et employés d’un supermarché au seul prétexte de leur couleur de peau. Dans son « manifeste », le tueur a été « inspiré » par des crimes commis par des suprémacistes blancs, tel que le massacre en 2019 de 51 fidèles dans deux mosquées de Christchurch, en Nouvelle-Zélande. Il avait pris le temps de graver (ou faire graver) un mot injurieux, raciste et tabou aux États-Unis pour désigner les personnes noires qu’il avait peint en blanc sur le canon de l’arme. « C’était du terrorisme intérieur, purement et simplement », a déclaré la procureure générale de New York.
Les dégâts de la période Trump, le poids des réseaux sociaux où tout est autorisé (« Les réseaux sociaux permettent à cette haine de fermenter et de se répandre comme un virus » a déclaré la gouverneure de New-York) , la démagogie populiste d’une grande part de la classe politique, la liberté d’accession aux armes de guerre ont conduit à cette tuerie révélatrice de cette Amérique qui donne des leçons au monde mais qui se révèle incapable de juguler les pires atteintes au valeurs humanistes. Cette tuerie raciste en rappelle en effet deux autres : celle d’El Paso au Texas en 2019, où 23 personnes avaient été tuées par un militant d’extrême droite, dont 8 Mexicains et des personnes « hispaniques », et celle de Charleston en Caroline du Sud, où un suprémaciste blanc avait tué 9 fidèles afro-américains dans une église en 2015. Dans ces deux cas, des manifestes haineux avaient été mis en ligne avant les attaques.
Les fusillades dans les lieux publics sont quasiment quotidiennes aux États-Unis, et la criminalité par armes à feu est en augmentation dans les grandes villes comme New York, Chicago, Miami ou San Francisco, notamment depuis la pandémie de 2020. Tout arrive chez nous de la même manière. Les mêmes causes (puissance destructrice des mots, incitations ouvertes ou déguisées à la haine, banalisation de toutes les formes de violence) produiront les mêmes effets car le déraisonnable est toujours plus fort que la tolérance. « Nous devons travailler ensemble pour combattre la haine, qui demeure une tache sur l’âme de l’Amérique » a commenté le Président actuel des USA. Si ça pouvait inspirer les électrices et les électeurs français.
« Il avait pris le temps de graver (ou faire graver) un mot injurieux, raciste et tabou aux États-Unis pour désigner les personnes noires, qu’il avait peint en blanc sur le canon de l’arme. »
Le tueur de Christchurch aurait fait la même chose en « ornant « son arme de dessins et insignes empruntés au célèbre régiment Azov….(mais chut, faut pas le dire).
« Nous devons travailler ensemble pour combattre la haine, qui demeure une tache sur l’âme de l’Amérique »
La haine étant consubstantielle à l’existence, à la naissance, à la formation, à la politique même(nationale et internationale ) des États Unis, cette déclaration est particulièrement hypocrite.
D’ailleurs parfois ce n’est même pas de la haine, c’est de la simple bêtise et méchanceté inconscientes (Hiroshima et Nagasaki).
Il faut bien entendu se garder de tout parallèle excessif avec les USA. Mais l’actualité est marquée depuis quelques années par un délire raciste et xénophobe contre tout ce qui est présumé « musulman » (renforcé par des attentats terroristes et des amalgames honteux). Les médias officiels et officieux déversent un flot de haine à jets continus. Ainsi a été adoptée une loi visant à réprimer « le séparatisme » au nom de la laïcité (sic !) et remettant en cause les libertés démocratiques.
Comment ne pas partager ce que dit l’UJFP (Union Juive Française pour la Paix) :
« L’utilisation de la notion de « liberté d’expression » jusqu’à la nausée par un pouvoir qui la brime depuis des années, en instaurant des lois d’exception, en interdisant ou en réprimant les manifestations populaires, et désormais en appelant à l’interdiction d’organisations humanitaires ou militantes, a quelque chose d’obscène.
Nous connaissons les effets de cet engrenage criminel du racisme pour en avoir nous-mêmes subi les conséquences. La généralisation des discours antimusulmans à chaque fois que se produit un acte criminel d’un jeune égaré [ou manipulé, ndr], constitue en quelque sorte une victoire des auteurs de ces actes contre la démocratie.
L’atmosphère empoisonnée d’aujourd’hui peut permettre de comprendre ce qui a dû se passer en France et en Allemagne pendant les années 1930. Comment une société entière a pu être petit à petit contaminée par des discours politiques et la presse antijuive, pour se retrouver embrigadée dans une croisade exterminatrice. »
Comme le disait Rosa Luxembourg : « La liberté, c’est toujours la liberté de celui qui pense autrement ».
Bien d’accord !
Un petit bémol cependant : pour avoir la paix, éviter les provocations, et surtout respecter mes concitoyens, je me garde d’exposer et de déclarer ostensiblement mes convictions ou non convictions religieuses qui sont du domaine de l’intime.
J’avoue que parfois je suis un peu indigné par l’outrecuidance de personnes qui affichent ostensiblement leurs supposées croyances, quelles que soient ces croyances. Ce sont d’ailleurs ces gens là qui font le plus de mal à leur cause.
Pour vivre heureux, vivons cachés.
Je pense que la couleur de peau est ici l’expression qui favoriserait les ententes entre les blancs et les blancs et les noirs. « Black Live Matter ». Dans la population américaine les noirs comptent aussi. Il faut le dire pour que cette expression devienne une force mondiale pour éradiquer l’esclavage à travers le monde.
» Sale race d’espadre, fous le camp dans ton pays… »
Combien de fois l’ai-je entendu cette phrase maudite !
Et bien aujourd’hui, je lui dis merci !
Merci Jean-Marie pour ce Roue Libre retraçant bien cette haine montante de façon très inquiétante. Je m’interroge, ne serait-il pas possible d’interdire ces haines raciales et de tous genres sur les réseaux sociaux ?