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Diabolisez il en reste toujours quelque chose

Au cours de l’histoire sociale la diabolisation des comportements et des êtres a été une constante. Dès qu’un pouvoir voulait détruire une idée, une entité critique ou hostile, il invoquait le diable sous toutes ses formes en opposition avec une opinion dominante souvent religieuse. Des tribunes ou des tribunaux se sont chargés de ce travail consistant à faire peser une forte suspicion de comportement dangereux sur des personnes à éliminer. On a torturé, écorché, égorgé, éventré et même brûlé des milliers d’hérétiques désignés à la vindicte publique.

Ce phénomène effectue son retour dans la vie publique grâce au soutien inconditionnel du système médiatique avide d’oppositions farouches et spectaculaires. Plus question de dresser des potences ou des bûchers mais il est toujours possible « d’assassiner » dans le grand public des adversaires considérés comme dangereux. Sauf que ce jeu dangereux a ses limites car il perd vite de son efficacité. La technique du bouc-émissaire diabolique a cependant tout son intérêt. En fait il suffit de ressasser des mots ou de proférer des anathèmes calculés pour détruire ses adversaires.

La diabolisation a conduit par exemple aux pires extrémités. Les Calvinistes, les Cathares, les Templiers, les hérétiques en général, les révolutionnaires, les royalistes, les juifs, les immigrés et bien d’autres groupes humains se sont retrouvés jetés en pâture à la majorité croyante ou simplement noyées sous la propagande. Un corps social diabolisé ne saurait parvenir au pouvoir. Il est assez facile de couvrir un homme ou ses troupes de l’opprobre du non respect des codes établis en utilisant des excès divers. 

Depuis déjà pas mal de temps la Marine nationale tente d’effacer cette marque dangereuse pour sa réussite électorale. Pour y parvenir, en politique comme dans d’autres secteurs le silence est d’or. Ne plus afficher ses convictions susceptibles d’être attaquées sur la place publique et se contenter d’observer avec seulement quelques paroles allant dans le sens supposé de l’opinion dominante. Le RN n’a pas le privilège de cette stratégie. Durant les quarante années ayant suivi la dernière guerre mondiale les Communistes ont réussi cette mutation avec un point d’orgue en 1981 et leur retour au gouvernement.

Le danger c’est que la dédiabolisation similaire à l’aseptisation de la pensée et des actes conduit à la disparition du paysage tellement on est parvenu à l’intégrer. En général on vote depuis pas mal de temps « contre » quelque chose ou quelqu’un. En supprimant de son vocabulaire la « lutte des classes » la Gauche a perdu ses repères simples et concrets pour se dissoudre.

Le retour de la France Insoumise sous la houlette de Mélenchon « stigmatisateur » hors pair de ses adversaires aura permis de recréer une entité rivalisant avec le RN. Cette situation a inspiré le ministre de l’intérieur qui, grâce au contexte du refus de la réforme dite des retraites ou de la construction des réserves alternatives d’eau a entamé un poker menteur politicien.

D’abord en répandant dans les médias à son service l’idée que le diable avait quitté les équipages de la Marine nationale pour s’emparer de la Nupés. En abandonnant totalement l’implication de groupes fascisants dans les incidents liés aux intrusions plus ou moins organisées dans les cortèges, le ministre qui possède toutes les clés de la communication officielle participe à l’accentuation de la dédiabolisation du RN. En revanche il qualifie de gauche, extrême-gauche, ultra-gauche les casseurs il entame par l’amalgame une campagne de peinture en rouge sang de tous les partis progressistes.

Cette opération savamment orchestrée a atteint son paroxysme ce week-end. Presse écrite, radio, télés du même groupe ont relayé une attaque ciblée sur Mélenchon et ses partisans. Insinuations, utilisation d’un vocabulaire provocateur, généralisations abusives, redites calculées : le but a été atteint : en transférant la violence, la bordélisation ou la chienlit sur le comportement de la gauche il se rapproche dans les faits du RN et détruit l’image du mouvement social. En s’instaurant comme le porteur de l’ordre dans une période de forte contestation il se constitue un socle commun avec la droite extrême.

Le diable n’est pas que dans le détail, il est aussi dans les stratégies de communication. En désignant les « responsables » qui deviendront très vite les « coupables » dans l’opinion publique l’instigateur de cette montée au créneau espère devenir incontournable pour occuper le donjon de Matignon. Il récupère une part de l’électorat apeuré en rejouant le coup des gauchistes dévastateurs et dangereux. Et lui il fait face. Impossible de ne pas sentir cette pressions sur l’opinion dominante dans le résultat de l’élection législative partielle ariégeoise. La diabolisation a eu son effet. A méditer !

Cet article a 8 commentaires

  1. christian grené

    Ezio me souffle à l’oreille une réponse du jour: « Chi ha mangiato il diablo, mangie anche le corna »

    1. facon jf

      Le bestemmie fanno come le processioni,che tornano onde si partono.
      cordiali saluti

  2. J.J.

    « En fait il suffit de ressasser des mots ou de proférer des anathèmes calculés pour détruire ses adversaires. » Procédé bien connu de don Basile qui le recommande au docteur Bartolo.
    Une variante : un mensonge répété mille fois devient une vérité.
    Il est vrai que le « vrai » diable, fait toujours partie de l’arsenal des sectes pour effrayer le « fidèle ».
    Au XXI ème siècle, on peut constater avec une certaine stupéfaction qu’il existe toujours dans le évêchés catholiques un prêtre exorciste(je pense que pour ne pas faire trop médiéval, on ne dit plus qu’il peut pratiquer des exorcismes) à qui l’on peut s’adresser si l’on subit les attaques du (dard?) »malin ».
    Dans le même ordre d’idée, j’ai regardé cette semaine le film  » les Éblouis » qui relate une histoire dont en gros le scénario est inspiré de faits réels de dérive sectaire. Sans être vraiment étonné, ça m’a quand même « interpellé » comme on a coutume de dire.

    1. facon jf

      @JJ pour revenir sur mon petit proverbe Italien de ce matin que l’on peut traduire  » Les blasphèmes sont comme des processions, qui reviennent d’où elles sont parties. »
      La vérité finira par arriver même si « Quand le mensonge prend l’ascenseur, la vérité prend l’escalier.  »
      Le tapage merdiatique et les anathèmes proférés à l’encontre de tel ou tel apparaîtront pour ce qu’ils sont une simple diversion.
      Et pourtant c’est grave un économiste fait un point sans concessions ici:
      https://yewtu.be/watch?v=mHIaMmc0CfQ
      cordialement

      1. François

        Bonjour @facon jf !
        Et MERCI pour ce lien ….qui, malheureusement, ne vient que conforter mes idées intimes.
        Une plus grande diffusion, bien que néfaste pour nos « dirigeants » serait souhaitable.
        Encore faut-il que les consciences chloroformées soient réceptives !
        Peut-être, si la faim les tenaille …mais il sera bien tard ! ! !
        Cordialement.

        1. François

          (suite)
          Les plus de 700 commentaires qui accompagnent ce lien sont, dans la majorité, encourageants en termes d’impact et de sondage, ce qui me confirme la nécessité d’une plus grande diffusion. À transfèrer … sans modération !

  3. Christian Baqué

    Il sera difficile dans ces conditions à Hollande/Delga/Cazeneuve/Valls, de constituer l’aile « gauche » d’un macronisme de plus en plus réactionnaire.

  4. Patrick G

    Ben oui ! Il est toujours étonnant pour ceux, hélas pas si nombreux, qui cherchent à comprendre ces chantres d’une « modernité » décomplexée, que c’est dans l’Histoire que l’on trouvera les clefs de leur déraison. Ils baladent tellement « leur populace » dans l’éventail de ce qu’il reste de démocratie, qu’il en devient nécessaire de garder la tête froide si l’on veut ne pas se perdre dans les mystifications grossières de leurs sinistres desseins . Leur illibéralisme dénié copie sans état d’âme celui d’un Vicktor Orban qui, nous a-t-on dit, exerce une politique d’extrême droite… afin d’empêcher l’extrême droite de parvenir au pouvoir. Un régime qu’ils qualifiaient d’infréquentable. Ben voyons !

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