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Il y a fraude sociale et fraude sociale…

Promis… juré : l’État va s’attaquer aux fraudeurs sociaux et même fiscaux. Ce ne serait que justice citoyenne. Sauf que bien évidemment derrière l’annonce il y a des réalités différentes de celles qui sont présentées. Politiquement il s’agit de conforter la pensée démagogique que les fraudeurs sont des miséreux, des fainéants, des immigrés, des profiteurs venus spécifiquement chez nous pour faire fortune. L’exemple emblématique des accusateurs réside dans l’appel à sanctionner les abus dans l’attribution du RSA. Personne n’en connaît les modalités d’attribution et personne ne précise que 35 % des possibles attributaires ne savent ou ne peuvent pas le demander !

La Cour des Comptes s’égosille à rappeler que la fraude sociale n’est vraiment pas celle que l’on dénonce pour plaire au peuple avide d’idées toutes faites. Ses rapports toujours passionnants à lire ne son même pas évoqué sur les relais médiatiques et les gouvernants s’en servent pour caler le pied usé de leur bureau Louis XV. Pourtant malgré parfois des analyses biaisées ces jugements constituent des éléments essentiels pour apprécier la réalité politique.

Ainsi sur la fraude dite sociale, la Cour vient d’affirmer que selon ses études le montant se situait entre 6 et 8 milliards . Cette estimation diffère nettement des éructations de l’équipage de la Marine nationale contre les allocataires du RSA. Les juges citent la somme de 4 milliards pour la seule tricherie sur l’assurance maladie soit plus de 50 % de ce qui disparaît dans les poches de ces fraudeurs indignes. Enfin pas si indignes que ça puisque pour les sages de la rue Cambon les principaux fautifs sont… les professionnels.

Con nombre de médecins détournent ces fonds en se faisant rembourser des actes fictifs jamais réalisés ; des infirmiers déclarent des actes incompatibles entre eux ; des kinésithérapeutes changent les codes de leurs actes et des ambulanciers exagèrent sur les trajets, les horaires ou la nature des transports. Elle parle bien de fraude volontaire et non pas d’erreurs d’inattention. Le total représente annuellement la bagatelle de plus de 3 milliards. Bien évidemment le gouvernement va s’attaquer aux racines de cette fraude. Enfin presque puisque les annonces portent sur des fausses cartes Vitale qui ruineraient le pays ou la CMU qui plomberaient les finances du système de solidarité sociale.

Le Président bat en brèche le discours « officiel » en résumant ainsi la situation : « L’assurance-maladie ne contrôle que de 1 à 4% des factures émises par les différentes professions. Aucun contrôle n’a été effectué depuis la crise sanitaire sur les factures des établissements de santé. Aucun. En 2022, les CAF ne contrôlent sur place que 3% des 3,1 millions de foyers bénéficiaires du RSA. Et donc, il faut très clairement changer d’échelle, changer de vitesse. Il y a deux choses qui doivent être faites. D’abord, il faut augmenter les moyens du contrôle. Et puis deuxièmement, il faut que ces contrôles soient mieux ciblés. Et tout ça demande un certain courage politique. » Donc on contrôle davantage les ressortissants du RSA que les professionnels de santé alors que les sommes détournées ne sont pas comparables !

« Courage politique ! » Belle formule et un vœu pieux. Si l’on regarde les votes ou l’abstention des allocataires du RSA et ceux des acteurs du système de santé elle prend toute sa signification. Le souci présent s’est de sécuriser au maximum la carte Vitale ce qui va coûter une blinde pour espérer un retour dérisoire. La rédactrice du rapport n’y va pas avec le dos de la cuillère : « « Quand il s’agit de professionnels de santé, on peut avoir quelques gros fraudeurs, donc un nombre relativement petit de fraudeurs pour des montants importants. Alors que quand il s’agit d’individus, de patients ou d’assurés sociaux bénéficiaires d’allocations diverses, c’est le contraire. On a un nombre très important d’allocataires pour des montants fraudés individuels qui sont relativement réduits. Et donc il faut faire beaucoup, beaucoup de contrôles pour arriver à récupérer des montants fraudés. »

Les pistes existent. Par exemple, contre les fraudes commises par les professionnels de santé, il faudrait améliorer les systèmes informatiques. Des mises à jour permettraient de bloquer, par exemple, les factures d’actes incohérents. Comme on récupère actuellement entre 1 et 10 % des sommes détournées l’effort ne serait pas inutile. Selon le rapport, la Cour a trouvé à peine 45 cas de soignants déconventionnés en 2022, après 28 en 2021, 14 en 2020 et 34 en 2019. Une affaire de « courage politique » probablement.

Cet article a 4 commentaires

  1. J.J

    Pendant un temps courait l’information (vraie ou fausse ?) que certains pharmaciens (ne jetons pas l’opprobre sur la profession) se procuraient et utilisaient un logiciel permettant de truander les déclarations de TVA.

    Il y a de la fraude certainement à tous les niveaux, mais je crains que les champions toutes catégories, et les plus voraces, se trouvent chez certains (j’ai bien dit certains) employeurs qui « oublient  » , avec toutes sortes de moyens et d’arguties, de déclarer et payer les cotisations sociales.

  2. facon jf

    Bonjour,
    si vous cherchez vraiment le truandage des professions de santé sur la facturation des actes, je vous donne mon coin  » à champignons » les Ehpad. Voila un système extrêmement juteux de prescriptions d’actes et de médocs garanti sans contrôles. Une véritable pompe à phynances (mot inventé par Alfred Jarry pour dénoncer l’avidité de son personnage Père Ubu pour les finances) de prescriptions minant la santé des résidents et la sécurité sociale. Je visite toutes les semaines mon ancien voisin de 96 printemps à mobilité réduite mais à l’esprit toujours vif. Le personnel médical distribue les bonbons pharmaceutiques sans prendre le temps d’expliquer au résident ce qu’il y a dans la bonbonnière magique. Pourtant l’ARS tire le signal d’alarme sur le sujet.
    Les enquêtes menées dans les EHPAD d’Aquitaine et du Limousin montrent que 85% des résidents sont « polymédiqués », que l’excès de traitement concerne 25% des résidents et que la prescription inutile concerne 70% d’entre eux. Ainsi, les facteurs d’iatrogénie médicamenteuse sont nombreux : sujets souvent polypathologiques, polymédiqués avec régulièrement des facteurs physio pathologiques aggravants (fonction rénale altérée, troubles du comportement,troubles cognitifs, état nutritionnel, etc). Certaines classes médicamenteuses nécessitent une vigilance accrue : anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS),psychotropes, médicaments du système cardiovasculaire, anticoagulants, antidiabétiques, etc.
    En effet, il s’agit d’un enjeu majeur de santé publique. Les effets indésirables des médicaments sont deux fois plus fréquents en moyenne après 65 ans, trois fois plus après 85 ans et 10% à 20% de ces effets indésirables conduisent à une hospitalisation.
    L’avis du patient est-il demandé au sujet des médocs ?? Vous rigolez la majorité des résidents sont dans l’incapacité de discuter de leur traitement avec le médecin qui passe en courant d’une chambre à l’autre … Et puis c’est tellement facilitant de donner un bonbon magique au résident un tantinet  » casse-bonbon » .
    Bof pas grave si la médication à outrances cause des effets secondaires, il y a des médicaments pour traiter les effets secondaires et tout le monde en profite … Ou presque !!
    Bonne journée

    1. J.J.

      « il y a des médicaments pour traiter les effets secondaires et tout le monde en profite …  »
      Je prenais un médoc pour mon mal de dos ; mais celui-ci me faisait « gonfler, boursoufler ». Mon toubib m’avait dit: « il faut que je te donne un traitement pour empêcher ça. Mais au fait, l’antiinflammatoire pour ton dos te soulage-il vraiment ? »
      – Bof…
      – Bon, , et bien tu arrêtes tout, c’est le plus simple, sinon on n’en finira pas … » Et je pensais, c’est aussi le plus sage.

  3. Gilles Jeanneau

    J’attendais plus de commentaires!
    Car en matière de Sécurité Sociale, tout le monde a son mot à dire et pas toujours juste. Pour avoir travaillé 42 ans dans l’Assurance Maladie, je peux vous dire que j’en ai vu des vertes et des pas mûres…
    Les plus grosses fraudes ne sont pas toujours où l’on croit effectivement.
    Et j’ai vu des classements sans suite à l’encontre de professionnels de santé …qui sont à mon avis les plus nombreux à frauder, mais ce n’est que mon avis.
    En ce qui concerne les employeurs, c’est très difficile à chiffrer, le travail au noir!
    Bref, c’est un sujet trop sérieux pour être exploré!

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