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La France au coeur des rivalités minières du Sahel

Bien évidemment la mort de soldats français dans une guerre qui ne ressemble pas au prototype des affrontements entre armées conventionnelles constitue une nouvelle dramatique. Ils honorent leur métier et leur action puisqu’elle les a conduits à donner leur vie pour une République qu’ils se doivent de servir loyalement. Et ils le font ! Les militaires tentent en effet dans cette zone sahélienne, impossible à vraiment contrôler, de lutter contre un ennemi dont les motivations demeurent obscures.

Les observateurs sachant dépasser le niveau de l’émotion et des idées toutes faites s’interrogent sur les motivations de l’opération Barkhane sur un continent où le « colonialisme » a pris d’autres formes que celles de la fin du XIX° siècle et du début du XX° siècle. La main mise sur les richesses a changé de nature mais les procédés sont les mêmes : hommes de paille et exacerbation des affrontements ethniques ou religieux.

Chaque grande puissance a ses actions spécifiques pour tenter de contrôler des territoires et chaque gouvernement ses complicités pour s’enrichir au détriment des peuples. Les militaires français sont morts en « héros » et c’est leur honneur pour défendre nos libertés mais est-ce-tout ? Il faut aborder la réalité sans faire offense à leur sacrifice.

Les terroristes poursuivis par les soldats français sont en effet trop souvent des éléments visibles de trafics d’êtres humains, de marchandises valorisées, de drogue, de pétrole ou de métaux précieux. Malgré un contexte très dangereux, chaque jour les grands explorateurs du sous-sol engrangent des gisements potentiellement exploitables malgré des difficultés d’acheminement des minerais.

Le Mali, qui bénéficie d’un code minier favorable aux investissements, est désormais le troisième plus gros producteur d’or en Afrique après l’Afrique du Sud et le Ghana. La production d’or représente 95% de la production minérale du pays. Il faut le savoir.

En marge de cette exploitation, un certain nombre de ressources sont connues depuis parfois des décennies mais ne sont pas exploitées, notamment en raison de l’enclavement du Mali et de la faible densité des infrastructures de transport. L’or est développé justement car il fait partie de ces minerais dont l’évacuation n’est pas coûteuse et ne nécessite pas d’infrastructures de transport de qualité. Des diamants ont été découverts par les mineurs d’or (artisanaux) dans la région de Kéniéba.

Quelques gisements de kimberlite, dont certains diamantifères, ont été trouvés, mais aucun n’a donné lieu à une exploitation commerciale. Le site Mbendi recense un projet de mine de diamant à Kénieba. Les autres ressources minérales sont la bauxite, le minerai de fer, le calcaire (dont certaines ressources pourraient être exploitées pour la production de ciment), le manganèse, le nickel, les phosphates, l’étain et l’uranium. Du gaz vient d’être découvert dans la région de Gao. Bref il existe un potentiel.

L’uranium représente 70,8% des exportations totales du Niger en 2010. Cependant, sa contribution au PIB ne s’élève qu’à 5,8% cette même année. Les investissements sont alors essentiellement tournés vers la recherche et l’extraction de l’uranium et de l’or.

L’uranium reste la substance la plus recherchée:en 2007 elle représente 76% de l’ensemble des permis de recherche et d’exploitation confondus; l’or vient en deuxième position avec 19%; les autres substances, dont le charbon, se partagent les 5% des permis restants.

Nouna, à l’ouest, et Essakane, au nord, pourraient être les nouvelles routes de l’or noir et de l’uranium au cœur de l’Afrique de l’Ouest au Burkina qui était en passe devenir un producteur de pétrole et d’uranium ! On parlait il y a quelques mois du futur aurifère du Burkina-Faso avec ce minerai devenu, le premier produit d’exportation du pays devant le coton, l’or blanc. Dans quelques années, en plus du manganèse, du zinc, le « pays des hommes intègres » pourrait se découvrir une vocation de producteur d’or noir et d »uranium.

Bien entendu ces éléments n’entrent pas en ligne de compte dans la situation du Sahel… et la géopolitique économique n’a aucun rôle. Des milliards se jouent dans les bourses mondiales sur le cours des minerais et sur les découvertes faites par des entreprises qui accumulent des permis de recherche et se battent pour éliminer la concurrence. Les peuples des pays sahéliens crèvent de faim assis sur des filons d’or mais ils voient passer les profits devant eux.

Mon « ami » Ag Sid ahmed Hama ancien président touareg de la région de Kidal écrit : « (…) L’or exploité dans le Sud du Mali par des sociétés maliennes qui sont présentes dans ces zones uniquement. Un or qui ne profite à personne excepté ceux qui l’exploitent. Il y a effectivement de l’or au Nord-Est de Kidal. Mais ces zones sont uniquement occupées par des touareg sans oublier des soudanais, des tchadiens, des nigériens qui sont venus avec des équipements et ce qui empoisonne toute la nappe phréatique de cette région. Il y a ceux qui accusent les forces étrangères d’exploiter des richesses, celles qui luttent contre le terrorisme, alors il est bon de poser la question à ceux qui répandent des tels mensonges, qu’il y a ceux qui veulent savoir où sont ces gisements d’or, de diamants qui sont exploités par ceux qui sont venus lutter contre le terroristes? (…)  Bien entendu les terroristes n’ont pas été tous éliminés et ce n’est pas demain que cela se fera. Puisque personne ne veut le faire et attend l’autre le faire à sa place  ». Que puis je écrire de plus ? 

Cette publication a un commentaire

  1. J.J.

    On croit mourir pour la patrie, on meurt pour des industriels.
    Anatole France (l’Humanité, 18 juillet 1922)

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