Les taxes, impôts sournois… et inodores

En matière de fiscalité, la différence entre la Droite libérale et la Gauche gestionnaire se noue autour de deux mots qui, en apparence, sont aussi douloureux l’un que l’autre. Le contribuable moyen ne fait pas forcément l’analyse qui lui permettrait de jauger deux « politiques » diamétralement opposées et qui sont fondamentales. Pourtant, au moment de voter, il devrait faire des calculs très simples lui permettant de se prononcer lucidement sur les propositions des uns et des autres.
Le premier conseil qu’on pourrait lui donner, c’est de bien réfléchir sur le mot « impôt » et sur le mot « taxe ». Il franchirait ainsi un grand pas dans la citoyenneté et dans son adhésion aux idées de Gauche. Ainsi, lors du vote du budget du Conseil Général, Yves Foulon, le pote de vélo de Nicolas Sarkozy, avant qu’il aille faire son footing ailleurs qu’à Arcachon, n’a pas pu s’empêcher de lancer la plus facile des accusations :« les socialistes ne savent qu’augmenter les impôts ». Un slogan ressassé sur les estrades, devant les caméras, les micros, et relayé dans les journaux, durant toute la campagne des régionales avec le succès que l’on connait. Il est inique et véritablement dangereux pour la vie sociale, mais il…. rapportait gros ces derniers mois.
Même si, dans une chronique lointaine, j’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer sur le sujet, je ne supporte pas cette facilité politique qui consiste à condamner « l’impôt » alors que, faut-il le rappeler, il est le fondement même de la solidarité républicaine et de l’identité française. A force de marteler le concept selon lequel « l’impôt est une prestation pécuniaire requise des particuliers par voie d’autorité, à titre définitif et sans contrepartie, en vue de la couverture des charges publiques », on a fini par achever le principe originel. » Il n’y a plus de corrélation entre une équitable participation à la satisfaction des besoins de l’individu dans la collectivité, et la vision détestable de la perception des sommes collectées, pourtant indispensables à la mise en œuvre des réponses. A force de critiquer, dénoncer, vitupérer contre l’impôt, on a tué l’impôt. C’est même devenu le seul enjeu électoral auquel les Françaises et les Français soient sensibles. Ils ne veulent surtout pas être amenés à en payer lorsqu’ils n’en paient pas, et ils veulent ne plus en payer quand ils en paient ! Et en définitive, moins ils en paient, plus ils exigent l’accroissement des services qui découlent de ce qu’ils paient ! Comme les élus ont la trouille d’affirmer le caractère aussi juste que possible des impositions et de les assumer, on a laissé s’installer un rejet de cette participation progressive ou ajustable à la vie collective.
« Nous n’augmenterons pas les impôts » clament tour à tour Sarkozy, Fillon, Lagarde et leurs supporteurs UMP ! Michel Duchêne, adjoint au maire de Bordeaux a, par exemple, cumulé dans un élan démagogique le montant des augmentations décidées par le Conseil Général de la Gironde (en pourcentages évidemment pour que ça fasse plus vrai) depuis plus de dix ans… en oubliant bien évidemment de le rapprocher des services supplémentaires développés et de… l’inflation. C’est la règle UMP : il faut absolument faire un lien entre impôts et socialisme, et tous les arguments sont bons. Même les plus éculés ! Actuellement, dans toutes les municipalités, on se jette des taux à la figure. On s’assène des pourcentages d’augmentation. On tire gloire de la stabilité. Mais absolument personne ne raisonne objectivement en associant la contribution sollicitée à ses applications concrètes.
La culture ? « j’en ai rien à foutre, je ne sors jamais ! ». Le sport ? « J’ai passé l’âge ! ». La jeunesse ? « Il vaudrait mieux la mettre au boulot ou en taule ! ». L’école ? « De mon temps on se contentait d’apprendre à lire, écrire et compter et c’était suffisant ». Les routes ? « Elles sont dans un état pitoyable, mais il y a trop de voitures et trop d’habitants ». Tous les élus locaux un tantinet francs et honnêtes vous rapporterons des propos encore plus durs. La solidarité par l’impôt s’arrête sur le mur des égoïsmes. Nicolas Sarkozy depuis deux ans s’efforce d’exploiter ce filon social. «Je n’ai pas été élu pour augmenter les impôts, moi (…) ». Il n’arrête pas de le ressasser comme une parole biblique, et ses ouailles s’en inspirent puisque 3 % de hausse des taux de fiscalité locale dans une situation difficile, pour maintenir l’investissement et les aides sociales obligatoires, prennent des allures « d’augmentation scandaleuse » au Conseil Général. Certes, c’est le rôle de l’opposition, mais ce n’est plus le bon texte théâtral lorsque, à côté, on oublie que dans le même temps le gouvernement utilise la supercherie des « taxes » non-voyantes, incolores politiquement, inodores financièrement mais totalement injustes fiscalement pour compenser les exonérations ou des baisses d’impôts purement fictives. En effet, dans la catégorie je pique cent fois plus en toute tranquillité dans vos poches, des centaines de fois plus que je ne vous ai remis, on peut se régaler, puisque depuis son élection Nicolas Sarkozy et l’UMP ont créé, reformaté, réaménagé : la taxe pour le RSA (entre 1 et 2 milliards), la taxe sur les assurances et les mutuelles (1 milliard), la taxe sur l’intéressement et la participation (400 millions), la taxe sur les stock-options (250 millions), les franchises médicales (850 millions), la hausse des cotisations retraite (150 millions), la taxe sur la publicité des chaînes privées (incalculable actuellement), la taxe sur les compagnies pétrolières (150 millions), la taxe pour financer la prime à la cuve (100 millions), la taxe sur les ordinateurs (50 millions), la taxe pour copie privée des disques durs externes et clés USB (167 millions), la taxe sur le poisson (80 millions), la taxe sur les huiles moteurs (44 € par tonne de lubrifiant), la taxe sur les imprimés publicitaires (incalculable actuellement), la hausse de la redevance télévision (20 millions), la contribution exceptionnelle sur les ventes en gros de produits pharmaceutiques (50 millions), la taxe sur la téléphonie et internet (80 millions minimum), la taxe sur les grosses cylindrées (malus auto annualisé : 160 € par an par auto), le chèque transport (pas de plan de financement pour l’instant), la taxe sur les Produits pétroliers (déléguée aux régions), les IFER (taxes sur les réseaux d’électricité, de téléphone, de transports ferroviaires, les télécommunications, l’électricité, les éoliennes, les …), taxe sur les contrats d’assurances (TSCA) et il vient de renoncer (provisoirement) à la taxe carbone ! Toutes ne sont pas inutiles ou absurdes, mais elles devraient ramener à plus de modestie les envolées indignées des oies blanches de l’imposition locale.
Allez, faites un petit effort, regardez celle que vous payez, et méditez cette toute récente déclaration de Frédéric Mitterrand : la redevance audiovisuelle pourrait augmenter, même si rien n’a été prévu pour l’instant. C’est en tout cas une option que le ministre de la Culture et de la Communication ne juge «pas choquante». En revanche, 3 % sur un taux très faible c’est horrible pour le pouvoir d’achat. Comme aurait dit Coluche : salarié ce ne sera pas facile, malade c’est dur, consommateur c’est harassant, automobiliste c’est dangereux mais « salarié-malade-consommateur-automobiliste » ça va être très dur. Mais rassurez-vous, l’UMP veille et vous paierez moins d’impôts ! Au fait, quelle est la différence avec la taille, la gabelle et la dîme… rappelez moi qui les imposait ? Ah! si on mettait une taxe sur le repas UMP à l’Elysée, on pourrait baisser les impôts locaux.

Cet article a 3 commentaires

  1. Yvon BUGARET

    Qu’il est bon de rappeler toutes ces taxes pour la plupart injustes et que les français paient sans rechigner. Oui, l’impôt bien adapté au niveau des revenus de nos concitoyens est plus juste. D’ici 2012, il faudra rétablir la vérité sur le rôle de l’impôt.

  2. PIETRI Annie

    Durant de longues années, le système fiscal français était composé des impôts « directs » et des impôts « indirects ». En bâtissant un système fiscal cohérent, le législateur avait voulu en finir avec des taxes comme la gabelle, la dîme et la taille, impôts féodaux et inapplicables à un Etat moderne et organisé. Les « impôts d’Etat » étaient alors essentiellement l’impôt sur le revenu et la TVA; s’y ajoutaient les impôts locaux :taxe d’habitation, taxe foncière sur les propriétés bâties et non bâties, patente (devenue taxe professionnelles),couramment dénommées les « quatre vieilles ».
    Les impôts d’Etat alimentaient les caisses de l’Etat pour lui permettre de faire face à ses missions : éducation,santé,justice, police, armée,entretien des routes et des ports,etc…Les impôts locaux étaient destinés aux collectivités locales pour répondre à des dépenses purement locales, dans des domaines où l’Etat n’intervenait pas financièrement.
    Peu à peu, et de plus en plus, l’Etat s’est déchargé de ses missions fondamentales -et pas des moindres – sur les collectivités locales…sans leur transférer les ressources correspondantes ! Comment ces collectivités pouvaient-elles faire face, sans augmenter, et encore très modestement compte tenu de l’ampleur des transferts, l’impôt mis à la charge des habitants.
    Alors,avant de se livrer à une démagogie éhontée, les Foulon, d’Amécourt, et autres Duchêne feraient bien de balayer devant leur porte UMP, plutôt que de critiquer !
    Par ailleurs, il faut rappeler aux électeurs-contribuables qui s’insurgent contre l’impôt qu’ils acquittent et qui sert à des dépenses qui ne les concernent soi-disant pas, culture, sport, jeunesse, routes, écoles,etc…que l’impôt a aussi pour raison d’être, une juste répartition des charges entre les citoyens, tous les citoyens et a une fonction de de solidarité et de justice sociale.
    On m’a toujours enseigné que l’impôt le plus juste est l’impôt sur le revenu puisqu’il varie en fonction des ressources de chacun, et de ses charges de famille, et permet ainsi d’équilibrer l’effort fiscal entre riches qui en paient beaucoup parce qu’ils gagnent beaucoup, et pauvres qui n’en paient pas, ou peu, parce que leurs ressources sont plus faibles. Mais voilà ! au fil des réformes fiscales, et de la montée en puissance de la politique des copains et des coquins, tout ce bel édifice s’est effondré…pour en arriver au système le plus injuste qui soit, avec, summum de l’aberration, « le bouclier fiscal ».
    L’impôt sur le revenu ? Il ne représente plus désormais qu’une part très réduite de l’ensemble des ressources fiscales de l’Etat !
    Et la TVA, dont on m’a toujours enseigné qu’elle était l’impôt le plus injuste qui soit, puisqu’elle frappe, sans qu’il s’en aperçoive vraiment, le consommateur de biens et services, y compris les biens de consommation courante, elle frappe les familles nombreuses bien plus durement qu’un couple sans enfants.
    Au surplus, pour couper court aux amalgames volontairement mensongers de ceux qui nous gouvernent, il faut préciser que la TVA n’est pas un impôt payé par les commerçants, quels qu’ils soient, mais bel et bien une taxe acquittée par le consommateur, et lui seul. Le commerçant est en l’occurrence un « collecteur d’impôt »(c’est ce qu’on apprend à l’Ecole des Impôts) qui le reverse, avec plus ou moins de bonne volonté, d’ailleurs, au receveur des Impôts…..Ce qui prouve bien que la baisse de TVA accordée aux restaurateurs, soit disant pour alléger leurs charges et leur permettre d’embaucher, relevait du bourrage de crâne et de la supercherie. L’expérience l’a d’ailleurs démontré….
    Lorsque M. Sarkozy et ses acolytes clament qu’ils n’ont pas été élus pour augmenter les impôts, ils sont de la plus totale mauvaise foi. Outre que, comme tu le dis, ils en ont créé une série de nouveaux qui se cachent (indolore, inodores et sans saveur), ils ont aussi recours à l’emprunt pour faire face aux dépenses courantes de l’Etat, ce qui n’aidera certes pas la France à sortir de la crise !!

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