Les coups d'état quotidiens

Je ne sais pas si vous éprouvez parfois ce sentiment douloureux d’être pris pou un c.. ou une c….. Il génère systématiquement un révolte de ma part. Révolte inutile, mais qui soulage. Le malheur c’est que les occasions de ressentir cette montée d’adrénaline se multiplient, et qu’à force, je me sens, probablement comme vous, de plus en plus usé. C’est vrai que le plus facile consiste à se comporter comme les autruches en mettant la tête dans le sable de l’indifférence, mais j’ai beaucoup de mal à supporter cette position risquée pour son arrière train…
En fait, le mensonge règne dans une société française qui a totalement perdu ses valeurs. Des bribes d’informations, des approximations permanentes, des collusions évidentes, des truquages habiles, suffisent à mener les gens sur des chemins sans issue, seulement destinés à gagner du temps. On égare les gens dans un flot d’informations et de contre-informations pour parvenir à faire oublier l’essentiel. Cette manière d’opérer s’accélère, et prend de l’ampleur au plan national, grâce à la confiscation progressive de la liberté. Non pas comme ce fut le cas avec des contraintes policières fortes, mais beaucoup plus insidieusement, avec la fin de la séparation des pouvoirs, avec la perte constante des espaces ouverts à l’opposition, à la critique, à l’action collective.
En rendant absolument tous les pouvoirs constitutifs de la démocratie dépendants structurellement, financièrement, hiérarchiquement d’un seul clan politique, et en laissant l’économique réguler la vie quotidienne des gens, on arrive inexorablement à une nouvelle forme de dictature qui ne dit pas son nom. Dans cette progression vers un État dans lequel les citoyennes, constamment sous influence, constamment affaiblis sur le plan culturel, éducatif, social, la semaine écoulée aura constitué un tournant. Elle illustre, en effet, de manière exemplaire, le coup d’État en cours…sur deux sujets très différents, mais révélateurs d’un fonctionnement préoccupant.
Pendant des heures et des heures, les médias dominants ont inondé la France des turpitudes d’un groupe devant la représenter dans la compétition mondiale. Des milliers de lignes écrites avec la plume de l’indignation ont transcris des déclarations fracassantes de personnes totalement ignorantes de la réalité interne d’une pseudo équipe de millionnaires débiles. En fait, il ne s’est agi dans cette affaire que du reflet de la vie française actuelle, dans laquelle, à tous les étages, tout repose sur l’intérêt personnel. Ces deux mots sont la clé de tous les maux du présent : « intérêt » et « personnel ». Les Bleus n’ont été que le reflet désastreux de ce que porte en lui le libéralisme outrancier qui veut que l’intérêt général ne soit que la conjonction des intérêts particuliers… Tout le monde connait les racines du mal, mais tout est fait pour éviter que l’on creuse trop, car ce serait remettre en cause le concept lui-même qui tient lieu de crédo politique. Partout, la réussite individuelle a pris le pas sur tout le reste. Alors, cette semaine, les gentils Bleus, revenus au pays nourricier nous ont pris pour des c… et des c….. Ils nient tout en bloc. Ils minimisent tout. Ils expliquent que la solidarité à été la valeur constante de ce groupe intelligent, efficace et auteur d’un coup d’éclat destiné à démontrer justement leur soutien à une…noble cause. Les vilains canards sont partis bronzer en famille. Les autres sont condamnés au silence. Bien évidemment, le Chef de l’État a sauté sur l’aubaine pour récupérer le brassard de capitaine en tromperie organisée en globalisant (Etats généraux du football) des problèmes individuels (guerres intestines communautaristes) de telle manière que les responsabilités soient vite diluées. La notion « d’intérêt » a été prise au sens propre : la sanction n’a pas été morale mais… financière ! En conclusion du « grand déballage » qui fait pschitt, Eric Abidal a apporté une précision rassurante : « Le groupe vivait très bien, il était sain. Et, contrairement à ce que tous les supporteurs peuvent penser, les 23 joueurs ont l’amour de la France et du maillot. » Circulez, il n’y a plus rien à voir, à écouter et à dire !
Même processus sur cette pauvre (au sens affectif du terme) Bettencourt. Là encore, tout tourne autour des intérêts personnels. Ce que l’on reproche à Eric Woerth c’est justement, alors qu’il est normalement garant de l’intérêt général reposant sur des valeurs fortes : égalité, justice, indépendance, il soit entré de manière plus ou moins détournée dans une affaire d’intérêts personnels. Il nie, il embrouille, il obtient les soutiens les plus hauts placés, il débite des sornettes pour tenter d’égarer les personnes qui ne veulent pas comprendre que la vie publique, c’est avant tout servir plutôt que se servir. Les médias dominants diluent un principe simple, que Zola avait eu le courage extraordinaire de mettre à la une d’un journal (« j’accuse ») au nom de l’objectivité. Il n’y a pourtant qu’une seule vérité, car tout le reste relève de l’intoxication mortifère. Chaque pièce apportée au dossier confirme qu’il existe, au minimum, un doute sur l’implication d’un Ministre, dans un contexte où des intérêts particuliers sont en jeu. Du moment qu’il s’agit de fric, comme pour les Bleus, ce n’est pas grave. On va noyer tout ce qui relève simplement d’une atteinte aux valeurs républicaines sous des arguties plus ou moins contradictoires, de telle façon que, lentement, l’affaire soit noyée dans le flot de l’actualité artificielle. Dans le fond, Eric Woerth est un malheureux, une victime, un martyr, un héros… comme le sera bientôt Thierry Henry, Patrice Evra ou Nicolas… Anelka.
« C’est un excellent ministre. Le président de la République n’a strictement rien à reprocher à Éric Woerth », a déclaré, hier, l’Élysée. « On utilise contre lui la vieille technique de l’amalgame, a ajouté Jean-François Copé, le président du groupe UMP à l’Assemblée nationale. On accole des noms, des faits, et à partir de ça, on insinue un scénario. C’est la victoire de la rumeur. C’est sordide. »
C’est une affaire de mois…, et après, ça ira mieux. Ce genre de mauvaises histoires ne devrait plus arriver, car plus aucun secteur social pouvant la mettre en exergue n’échappera réellement au pouvoir actuel ! Je vous assure que je ne supporte plus d’être pris pour un c.. susceptible d’avaler n’importe quoi, au seul prétexte que c’est pour le bien des autres ! Je crains pourtant que le lavement se poursuive.

Cet article a 3 commentaires

  1. Gilbert SOULET

    Bonjour Jean-Marie

    Encore et toujours d’accord avec ton billet.

    J’ajoute que ce qui m’exaspère un peu plus, c’est que le Président de La République ose s’exprimer depuis « l’Etranger » pour parler de ces deux affaires!

    Rageusement,
    Gilbert de Pertuis en Luberon

  2. Un de 1947

    A que,à que oui, que tu as raison comme dirait une célébrité de notre génération!
    J’ajouterai simplement la réflexion d’un ami de régiment:  » Toute la politique française , c’est de l’effet cirage, celui que l’on passait généreusement sur les flans des pneus des engins militaires ….la veille du défilé dans l’espoir de camoufler les crevasses de l’âge et de l’usure, signes de l’éclatement proche ». Comme cette coutume blin-blin se perpétue ( c’est joli, un défilé avec des pneus « neufs »! ), lors des prochains 14 Juillet et autres, regarde la figure des chauffeurs: à leur crispation, tu sauras que l’explosion est proche … comme pour notre République !
    Sur un autre registre, la LGV, peux-tu nous expliquer l’intérêt « économique »de notre ami R … à traverser notre belle région , notamment le Pays Basque à 400 ou 5OO km/h si ce n’est pas pour gagner le temps … d’avaler 4 ou 5 toasts parisiens …ou madrilènes de plus! On dirait qu’il craind de trouver des gamelles ….vides ! !
    Cordialement

  3. sylvie

    et moins on se comporte comme des autruches et plus on est usés. Ceux qui ont la tête dans le sable, n’ont même pas peur pour leur arrière train. A croire que le compromis leur convient.
    Quelle engeance !

Laisser un commentaire