La fainéantise de la raison trouve son exutoire sur les réseaux sociaux

Une récente aventure sur le réseau Facebook m’a conforté dans l’idée que nous allions, grâce à l’anonymat des réseaux sociaux, vers des situations dramatiques. En effet un texte a circulé à une vitesse folle annonçant « un triple meurtre à Créon sur la piste cyclable » avec citation de la réaction de Pierre Gachet le Maire actuel sur cette information. L’auteur de ce texte cherchait probablement à appuyer la thèse de quelques habitants préoccupés par la montée des incivilités sur la commune… La bêtise à l’état pur ! Impossible de lutter contre une telle diffusion de fausses informations, contre le détournement d’images anciennes, contre des reprises de textes décalés dans le temps ! Le mal est fait et des dizaines de personnes parlent davantage de ces publications et y vont de leurs commentaires bien évidemment haineux ou crédules. Et quand le Maire veut porter plainte pour divulgation de fausses informations on lui retourne que dans le fond les propos qu’on lui prête ne sont pas tellement graves et ne mettent pas en causse son honneur ! Le reflet de ce qui est en cours : la banalisation outrancière du n’importe quoi ou la mise en avant de l’outrance sous toutes ses formes.
Des milliers de commentaires ou de textes publiés chaque jour sous des pseudonymes plus ou moins délirants méritent si on se réfère seulement à la loi à des condamnations en correctionnelle mais… personne ne s’en préoccupe. Il est vrai que les médias se délectent en ressassant à l’envi des « phrases » guère plus reluisantes décochées à l’égard de Christiane Taubira ou d’appréciations sur les « réfugiés » ou les « migrants ». On devient davantage célèbre sur les réseaux sociaux par l’insulte que par la poésie ou la raison ! Après le journal allemand Bild, un journal « Nord Littoral » en prise directe avec le drame humain de la « jungle » de Calais dénonce la montée du racisme et de l’antisémitisme. Comme son confrère le 20 octobre dernier, le journal local a en effet eu le courage de publier des commentaires haineux parus sur Facebook sous ses articles. J’entendais le rédacteur de chef expliquer qu’il  » en avait assez de retirer du site de son journal les articles au prétexte que des spécialistes de la haine postaient massivement des appréciations condamnables car incontestablement racistes ! » 
Dans un éditorial il a écrit : « Nord Littoral partage sur sa page Facebook des articles qui suscitent des réactions fortes, qui font parfois polémique, lesquelles polémiques nourrissent la réflexion, le débat. Ne pas avoir le même avis que son voisin, pouvoir échanger, confronter ses arguments est une chance dans notre pays. Elle le restera à condition que le respect et la tolérance finissent toujours par l’emporter ». Malheureusement cette tendance républicaine s’efface devant cette banalisation par certaines voix de la Droite et la totalité de l’Extrême-Droite de l’insulte ou pire du sous-entendu raciste de gesn bien propres dans leur conscience. Tendez l’oreille, écoutez les discussions autour des tables que vous fréquentez, enregistrez les pseudo-plaisanteries, prenez comme « ami » pour mesurer le phénomène quelques unes de vos connaissances… et vous verrez que la raison n’a plus d’effet réel sur certaines personnes engoncées dans la fainéantise de l’esprit qui leur fait admettre l’inadmissible et vous ne les ferez changer d’avis car ils sont imperméables à la raison , à la tolérance, à la différence ! Les pires contre-vérités sont sciemment diffusées rendant le journalisme vain et méprisé !
Le quotidien Nord Littoral a le courage de dénoncer les propos violents et répréhensibles sur les réseaux sociaux ce qui ne remet nullement en cause la liberté d’expression. Dans le même article la rédaction affirme : « Depuis plusieurs mois, les commentaires sur le sujet de l’immigration offrent un ramassis de propos inqualifiables. Dire cela, ce n’est pas être pro-migrant. Les Calaisiens ont le droit de dire qu’ils ne veulent pas des migrants dans leur ville ; Nord Littoral ne censurera jamais les internautes qui le pensent et qui l’écrivent. Notre journal n’exclura pas ceux qui estiment que Calais a déjà assez donné. En revanche, il signalera désormais tous les propos répréhensibles du point de vue de la justice. Pour le bien de tous, par respect. » On trouve ainsi dans le florilège des insanités publiées la vraie connerie raciste, puante, dégueulasse à vomir :  « « Pourquoi ne pas construire un camp de concentration, on sera tranquille » ; « Il suffit de leur rouler dessus, au bout d’une dizaine, ils se calmeront » ; « Et un de moins, yessss. Vous pouvez m’insulter, je m’en fous. »
Et c’est ce dernier qui doit inquiéter profondément les vrais Républicains ceux qui ont la fraternité rivée au fond de leur cœur, ceux qui  ne se contentent pas d’affirmer que « c’est pas grave ! ». Le mal est profond.
Il envahit même dans les blés en herbe des esprits des enfants et des adolescents où on ne trouve plus ces coquelicots de le révolte, de l’enthousiasme, de la passion fraternelle. La décision de Nord Littoral est un cri d’impuissance et de désespoir que je partage de plus en plus. Nous finirons par crever étouffés par nos renoncements !

Cet article a 4 commentaires

  1. STARCK

    triste constat mais constat ô combien réaliste de tout ce que la bêtise humaine peut accumuler, et cela toutes tendances politiques confondues.
    La démagogie des plus réputés tribuns dont se délectent les médias et les réseaux sociaux se passe de toute étiquette, et c’est sans doute ce qui est le plus grave …

  2. Gilbert SOULET

    Et oui Jean-Marie, n’oublions pas ce qu’a écrit Victor HUGO, il y a très longtemps avec le 1er vers des Châtiments : Ceux qui vivent, ce sont ceux qui luttent; Les autres je les plains …;
    Très amicalement,
    Gilbert de PERTUIS, porte du Vaucluse

  3. Christian Coulais

    Les commentaires de certaines pages Sud-Ouest font aussi comprendre le changement sociologique des internautes. Qui, pour autant, ne représentent pas la majorité silencieuse, celle qui ne s’exprime pas sur les réseaux numériques.

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