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Les porteurs de l’Histoire ne sont plus les bienvenus

La vieillesse étant un naufrage à partir d’un degré de dépendance physique ou psychique forte nous entrons dans un monde où le respect pour les personnes porteuses de l’Histoire a disparu. Dans absolument toutes strates sociales il est de bon ton de ne pas tenir compte des éventuelles leçons sur l’action publique dont sont porteurs les « anciens ». Le salut passe par l’invention constante, les actions inédites, les propositions se démarquant de ce ce qui avoir appartenu au passé. C’est à la fois louable et dangereux. Pour ne pas accepter les références aux décisions, aux parcours antérieurs bien des acteurs du présent filent vers de grandes désillusions.
La diminution constante de l’enseignement de l’Histoire, la transformation du poids de l’âge en fardeau social écrasant, la volonté manifeste de ne faire confiance qu’à la modernité, le rejet systématique des références aux conséquences constatées de certaines évolutions sociales au prétexte qu’elles ne sont plus transposables de notre temps : les facteurs de non-prise en compte du vécu analysé et vérifié deviennent croissants. Il est bien difficile pour celles et ceux qui possèdent la moindre expérience de la vie sociale de se faire entendre surtout si par malheur ils commettent l’erreur de commencer leur propos par la malheureuse formule de « de mon temps… ». Bien des témoignages, des rappels, des descriptions susceptibles de démontrer que le présent n’est que l’aboutissement d’un cheminement long, progressif, patiemment construit ayant nécessité bien des efforts.
C’est ainsi que les combats idéologiques, syndicaux, politiques, philosophiques sont estompés en un clin d’œil au nom de la nécessité de préparer au mieux un avenir meilleur. Et comme le temps est à la nouveauté, à la réforme, à l’inventivité on se contente souvent de refaire des chemins déjà parcourus ! Le débat sur les retombées des ordonnances consécutives à la modification du Code du Travail en témoigne amplement. Comme une minorité des salariés actuels ignore tout des luttes ayant permis de régir les rapports sociaux il est facile de leur « vendre » une promesse d’efficacité pour les plus en difficulté au détriment de celles et ceux qui ont été protégés par des textes arrachés par la lutte ou la négociation. Il en est ainsi dans tous les secteurs ! Comment comprendre els événements catalans quand on ne sait rien de la guerre civile d’Espagne ?
Impossible pour un senior de « raconter », de « narrer », de « rappeler », de « mettre en garde » puisque les auditoires sont tournés vers un avenir ressemblant de plus en plus au parcours du funambule au-dessus du précipice. L’expérience souvent demandée dans les propositions d’emplois devient un handicap lorsque celle ou celui qui la possède tente de revenir après en avoir été brutalement exclu dans le secteur actif. Les gens dépassant la cinquantaine voire la quarantaine rament quand ils sont au chômage.
Dans la vie publique on n’échappe pas à ces nouveaux principes. Les générations actuelles refont sans cesse les mêmes parcours, se heurtent aux mêmes obstacles, découvrent les mêmes réussites avec la certitude que ce sont elles qui les ont initiés. Il vaut mieux ne rien dire, rester discret, se réfugier dans un silence respectueux que se comporter en « ancien combattant » ressassant des campagnes oubliées ou réputées surfaites.
Le passé composé ou recomposé n’intéresse plus les auditoires du temps présent. La sagesse de celles et ceux qui en possèdent les clés consistent à s’effacer car ils gênent considérablement l’épanouissement de nouveaux constructeurs de ce quis era le passé de… demain ! Alors souvent il faut admettre de n’échanger qu’entre compagnons de route d’antan. Beaucoup de ces détenteurs sages de l’Histoire réelle renoncent d’ailleurs à se montrer ou à s’exposer quand d’autres s’acharnent à tenter de rétablir des vérités parfois désagréables. Et malheur aux porteurs de valeurs « historiques » car s’il osent les associer à leur action ils ne font que mettre en évidence qu’elles ne sont plus appliquées par les temps qui courent. C’est très mauvais pour le moral et pour la santé !
En ce qui me concerne je ne cesse de ressasser en vieil instituteur grincheux que si l’on ne sait plus d’où on vient on est incapable de savoir où l’on voit. « Brûler » les archives ou construire une société de l’instantanée qui n’en aura plus ne va pas faciliter la construction de lendemains qui chantent.
J’aime la nouvelle campagne ambitieuse de communication de France-Infos qui se termine par ce slogan capital : « il ne s’agit pas d’être le premier à apprendre mais le premier à comprendre ! ». Une véritable profession de foi citoyenne qui implique véritablement une modification totale des paradigmes relatifs à l’Histoire. Mais je doute fortement que cette louable ambition fasse l’unanimité dans le contexte actuel !

Cet article a 4 commentaires

  1. pc

    sur l’histoire: pourquoi n’enseigne-t-on pas dès le primaire l’histoire du 20ème siècle?
    pourquoi ne pas expliquer les ravages du fascisme conséquence directe de la première guerre mondiale et cause de la deuxième et ses 50 millions de victimes?

    sur le code du travail: 90% des salariés ne connaissent pas le code du travail même pour des notions aussi simples que les congés payés; la plupart ignorent que, mises à part les 2 semaines obligatoires en période d’été, les dates de congé sont à la totale volonté de l’employeur…

    Le jeunisme et la pseudo-modernité ne sont que la conséquence de l’ignorance.

  2. bernadette

    C’est notre histoire dans l’histoire racontée.
    Quant à la force de travail c’est un peu la même chose, le travail à été détruit par toutes ces panoplies de petits boulots.
    Le grand n’importe quoi d’une Ministre du Travail se prénomant Aubry.
    Une fois ces petits boulots installés, il fallait bien parler d’aménagement du temps de travail.

  3. bernadette

    Pas besoin de transport pour bosser, le télétravail va se développer. Travailler chez soi comme en Amérique est au goût du jour. Avec le télétravail pas de pollution ; pas besoin de rester des heures dans les bouchons. Quelle innovation !
    Dans les grands magasins plus besoin de caissière, le devenir de l’autonomie va se développer puis devenir responsable des produits choisis c’est une innovation.
    Pas besoin de passer des heures dans ces grands magasins de la lune. Commander par internet et vous serez averti que les courses sont prêtes.
    Il existe également une innovation de la chirurgie à distance pratiquée sur des patients à 1000km voire plus
    Il y en a temps des innovations. ….

  4. JJ Lalanne

    Je ne crois pas que à une époque où on souhaiterait plus de solidarité on puisse soutenir un tant soit peu l’ égoïsme catalan. Quand à la guerre d’ Espagne ne grattons pas trop sur les raisons de la victoire de Franco. Mon ex-beaucoup-père et mon oncle, réfugiés tous les deux, ont pris une part active et ont des commentaires peu reluisants pour certains comme également quand, forcés à travailler à la construction des blockhaus, ils tentaient de s’ évader et étaient ramenés aux allemands par des médocains. En France et en Espagne il y a eu beaucoup plus de résistants après la guerre que pendant ce qui donne plus de valeur aux vrais. Accepter des honneurs et se taire. Le courage du père de notre collègue Javerzac qui refusant la légion d’ honneur à du subir la pression des »bons notables » et voir sa voiture couverte de peinture rouge. L’ histoire, ç’ est bien, mais toute l’ histoire. C’ est vrai que l’ on faisait plus de place à l’ histoire histoire « de mon temps » mais combien de temps pour autoriser le film « les sentiers de la gloire » en France (entr’ autres). Tout devait aller dans le sens de la vénération du héros, du combattant, de l’ élu… Je remercie notre ancien professeur d’ histoire à l’ École Normale qui nous faisait compter les balles tirées au stand militaire du Luchey au son pendant ses cours pour nous expliquer combien ça coûte! Quand on sait les interdictions qui existent dans notre pseudodémocratie, cela constituait un acte de courage que je n’ ai jamais revu de la part de quelqu’ un de pleinement conscient. Ce pour dire que si les « jeunes » nous regardent, à part certains cas de ce
    type, ils verront plus souvent mensonge, corruption, profiteurs sous des couverts d’honnêtes gens, de notables et d’ élus. Ils ne comprendront pas que d’ autres honnêtes gens, notables et élus les soutiennent en toute sincérité parce que ne côtoyant que leurs semblables ils n’ ont pas accès aux faces cachées. Pour ce qui est du code du travail j’ai pu voir l’ expérimentation des nouvelles mesures par la CCI et l’ équipe Juppé. Je peux assurer que le salarié est sûr de se faire « bouffer ». C’ est du vécu. Dommage que des élus de gauche y aient donné leur concours mais les élus de ce bord, à leur décharge, avaient peu de conscience du monde de la grosse entreprise. Dommage que ce soit des salariés et des jeunes qui en aient fait les frais. Pas de scrupules à faire du Macron avant Macron. Décompte des réunions avec les représentants syndicaux bidon, réunions directes avec les salariés pour empêcher l’ action syndicale ou la faire désavouer avec des coups bas ou l’appâtage sordide à la prime, apologie du CDD contre le CDI, apologie du privé contre le public (y compris malheureusement avec un membre important du rectorat, réputé de gauche). Je pourrais continuer des heures mais je pourrais lasser. Je ne compte pas convaincre non plus ce qui ont été « informés » par des acteurs ou élus mouillés. Le mélange du public et du privé sert à certains. N’ allait-on pas jusqu’à me dire n’ informe pas ton homonyme secrétaire du SNI, moins il en sait mieux on se porte… Dites moi après l’ indice de confiance à attribuer à ces représentants (dont je ne vous dirai pas de quoi). Sachez quand même que certains avaient réussi à me faire exclure pour faire plus d’ heures sup!!! Après un combat difficile j’ ai réussi à être réintégré. Je remercie à cette occasion les Daléas de Bazas et Saubesty d’ Eysines réels militants PS de leur soutien. Ça mérite d’ être signalé

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